Ah, les champions français… Il serait injuste de dater la passion hexagonale pour les très grandes entreprises capables de gonfler le torse à l’international à l’époque gaulliste, qui en était pourtant friande : cette passion s’inscrit sans doute plus profondément encore dans les racines jacobines et universalistes de notre pays. Elle a connu des succès et des échecs, engendré des leaders mondiaux solides et des châteaux de sable emportés par la marée, alimenté et fragilisé un tissu de PME dont la préservation et le développement ne sont revenus que récemment à la mode. Dans quelle catégorie classer l’absorption de Zodiac Aerospace par Safran ? Hybris cocardière ou pragmatisme industriel ?

L’aéronautique n’est pas un domaine tout-à-fait comme les autres. Moins stratégique que la défense, il demeure néanmoins un sujet sensible, et la création d’un écosystème complet en Europe (et même, pour une grande partie, en France) a ses avantages dans la guerre commerciale qui oppose Boeing et Airbus et, à travers eux, leurs fournisseurs, encouragés par les deux avionneurs à devenir toujours plus gros – comme en témoigne la fusion récente des américains Rockwell Collins et B/E Aerospace. Zodiac, dont la gouvernance et le management ont été régulièrement mis en cause ses dernières années lors de différents retards de livraison, aura en outre l’occasion de remettre de l’ordre en sa maison. Le travail ne manque pas.