Dans son plan d’investissement industriel tous azimuts, Emmanuel Macron a donc promis six milliards pour renforcer la production hexagonale de semi-conducteurs. Il s’agit à la fois de tirer les leçons de la pénurie de composants actuelle et d’assurer “l’indépendance productive” de la France, un leitmotiv qui n’est pas sans provoquer une certaine dissonance cognitive venant de pouvoirs publics qui n’ont eu de cesse, depuis quarante ans, d’encourager les industriels à délocaliser et à financiariser leurs activités et de multiplier les accords de libre-échange à travers la planète.
Six milliards, c’est beaucoup dans l’absolu (surtout par rapport à la rallonge de 125 millions du plan de relance de 2020), et peu à la fois. Peu, car une usine flambant neuve de circuits intégrés coûte aujourd’hui au moins le double, et que la France a de toute façon perdu le savoir-faire nécessaire. A lui seul, TSMC va investir plus de 100 milliards de dollars dans ses usines d’ici à 2024…
Reste, surtout, à connaître les détails du plan. A savoir : d’où vient l’argent (nouvelle ligne de crédit ou agglomération de plans existants comme Nano2022 et de ristournes fiscales comme le Crédit d’impôt recherche ?), à qui il profitera (les grands fabricants français, les PME ou tout fournisseur implanté en France ?) et selon quelles modalités. Le tout sous la haute surveillance de l’Union Européenne qui ne goûte guère les subventions nationales, mais s’avère incapable de favoriser les investissements supranationaux à l’échelle du continent. Et quand bien même TSMC, Samsung ou Intel viendrait installer une de ses usines à l’état de l’art en France, cela ne renforcerait en rien l’indépendance française en la matière.