Il n’y a pas si longtemps encore, le militaire représentait une manne pour certains fabricants de semi-conducteurs qui voyaient là un bon moyen de se faire financer sur deniers publics des technologies de pointe indispensables aux composants extrêmes des systèmes d’armement, mais qui seraient ensuite réutilisées pour des applications civiles. Le militaire, pour des raisons évidentes, constituait aussi un bon moyen de s’approprier des marchés nationaux. Depuis, la baisse des crédits militaires (du moins en Europe) et spatiaux conjuguée à l’explosion des performances des circuits intégrés commerciaux a passablement entamé cette manne : les systèmes d’armement embarquent de plus en plus de composants “normaux”, les plus exposés étant préalablement triés sur le volet et/ou encapsulés pour résister à des conditions extrêmes. Les fournisseurs traditionnels de composants militaires se retrouvent donc de plus en plus concurrencés par des fabricants de composants télécoms ou automobiles.
La compétition s’intensifie également dans les domaines du spatial et de l’aéronautique. Ainsi, le gouvernement américain a modifié sensiblement les règlementations ITAR (International Traffic in Arms Regulations) afin de lever des restrictions de ventes des fournisseurs américains de composants durcis, désormais classifiés EAR99 et donc exportables beaucoup plus rapidement et simplement vers la majeure partie des pays “non sensibles” tels que la France, le Royaume-Uni, l’Allemagne ou le Japon. Des pays susceptibles d’offrir des débouchés plus faciles à atteindre pour les fabricants américains… sauf que ces mêmes pays ont appris à compter sur des fournisseurs locaux, justement pour contourner la lourdeur des restrictions ITAR imposées depuis 1999.
Davantage de composants standard et une concurrence plus fluide, donc, qui rapprochent ces marchés historiquement cloisonnés du reste de l’industrie des semi-conducteurs. En contrepartie, le resserrement des budgets, notamment spatiaux, implique que la durée de vie des équipements développés sera étirée au maximum, et donc que les composants embarqués doivent offrir des garanties de plus en plus draconiennes de longévité, de tenue en radiations et d’approvisionnement.