La saison des résultats annuels est ouverte. Et le champagne coule à flot : l’industrie des semi-conducteurs a connu une de ces années fastes qui reviennent cycliquement, quand la demande submerge l’offre et fait grimper les prix. L’un après l’autre, tandis que le monde avance encore masqué, les fournisseurs de composants publient des résultats financiers mirobolants. Que faire de tout cet argent ?
Les fabricants de composants choisissent en général parmi trois options. La première consiste à investir en capacité de production : de nouvelles usines leur permettront de mieux répondre à la demande future, avec de meilleures marges qu’en passant par un fondeur externe qui, forcément, prend son écot au passage. Le souci étant que l’usine flambant neuve ne commencera à produire en volume que dans 18 à 24 mois… Généralement en plein cycle baissier car d’autres fabricants ont eu la même idée, et toutes ces nouvelles usines inaugurées au même moment engendrent une surproduction.
La seconde option, c’est la croissance externe. Pour gagner des parts de marchés, quoi de plus simple que de racheter un concurrent ? Un choix qui peut s’avérer judicieux pour acquérir un nouveau savoir-faire, mais qui peut aussi paralyser l’entreprise, comme c’est souvent le cas lors des méga-fusions.
Enfin, la troisième option consiste à utiliser l’argent frais pour racheter et détruire ses propres actions. Objectif : doper mécaniquement le cours boursier afin de satisfaire la gourmandise des actionnaires (et des dirigeants, dont la rémunération s’avère généralement liée à la valeur de l’action). La hausse délirante des cours de bourse depuis quinze ans découle en grande partie de cette pratique qui transmute la valeur industrielle en bulle financière.
On le voit, dépenser judicieusement d’abondants bénéfices n’a rien d’évident. Pour les célébrer, c’est déjà plus simple : l’an passé, la France a livré 322 millions de bouteilles de champagne, en hausse de 32%.