A eux de nous faire préférer le train

Le 14/10/2024 à 6:41 par Frédéric Rémond

Imposée en partie par l’Union européenne, la libéralisation du chemin de fer national crée autant d’opportunités que de déboires. Ses promoteurs mettent en avant une meilleure capacité à répondre aux besoins des lignes les plus dynamiques, notamment dans le Grand Ouest. Proxima vient de commander 12 TGV dernier cri à Alstom tandis que la société Le Train ambitionne de rallier Rennes, Nantes, Angers et Bordeaux à grande vitesse sans passer par Paris. En théorie, tout ce qui permet de renforcer le train face à la voiture et à l’avion, bien plus polluants, semble bénéfique – et le ferroviaire est un débouché non négligeable pour l’électronique européenne.
En pratique, il n’est pas si facile de monter une compagnie ferroviaire ex nihilo. Preuve en est la liquidation judiciaire de Railcoop et la fin de Midnight Trains. Proxima attend ses premiers trains en 2028, mais des retards sont toujours possibles ; il faudra ensuite se faire connaître pour remplir ces trains, et, en attendant l’équilibre financier, convaincre les actionnaires de poursuivre l’aventure… Pas si simple ! Pionnier de la privatisation du rail dans les années 90, le Royaume-Uni procède d’ailleurs aujourd’hui à la renationalisation de liaisons peu fiables, hors de prix et très largement subventionnées par les deniers publics.
L’autre difficulté réside dans le soutien à la SNCF : malgré l’ouverture des lignes, l’opérateur historique assurera longtemps l’essentiel des dessertes en métropole, et, contrairement aux nouveaux venus, elle ne peut compter ni sur un matériel roulant 100% flambant neuf, ni sur une politique salariale dégagée de tout impératif historique ou syndical, ni sur la possibilité de n’exploiter que des lignes a priori rentables. Peut-elle au moins être assurée du soutien des pouvoirs publics, qui des décennies durant ont largement subventionné l’aérien et l’automobile ? Rien n’est moins sûr. Alors que la SNCF dégageait des bénéfices depuis trois ans, son P.-D.G. Jean-Pierre Farandou vient ainsi d’être débarqué par le gouvernement pour avoir osé signer un accord d’entreprise atténuant légèrement les effets de la dernière réforme des retraites.

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