A la veille de l’ouverture du CIEN, Nathalie Kosciusko-Morizet, Secrétaire d’Etat au Développement de l’économie numérique, nous explique que l’industrie électronique est loin d’être délaissée par les pouvoirs publics.
Si mes informations sont exactes, vous avez accepté d’inaugurer le nouveau salon de la filière électronique, le CIEN (Carrefour de l’Industrie Electronique et Numérique) qui se tiendra début juin à Paris. Cela fait très longtemps qu’un officiel n’avait pas inauguré un salon dans ce secteur. Est-ce la marque d’un regain d’intérêt politique pour l’industrie électronique qui est généralement un parent pauvre de l’action du gouvernement comparativement aux secteurs du logiciel et de l’Internet et des usages du numérique ?
Nathalie Kosciusko-Morizet : Je ne sais pas si nous pouvons parler de parent pauvre. En réalité, l’industrie de l’électronique est un secteur stratégique en France, et ce depuis bien des années. Technicolor, STMicroelectronics sont là pour rappeler l’intérêt des pouvoirs publics pour cette filière. Mais il est vrai que, dans la communication sur le numérique, on a un peu rapidement fait l’impasse sur cette industrie, en focalisant le discours quasi exclusivement sur les infrastructures.
Dès ma nomination comme secrétaire d’Etat en charge du Développement de l’économie numérique, j’ai voulu rééquilibrer l’action gouvernementale en prenant également en compte les secteurs des contenus et du logiciel. Cela fait des années qu’on en parle mais vous noterez désormais que l’on parle de plus en plus des logiciels et des contenus innovants français, et de leur apport en termes de compétitivité et surtout de création d’emplois dans notre pays. Cela ne signifie pas que le secteur de l’électronique est délaissé, bien au contraire !
Avec les investissements d’avenir, un effort sans précédent est engagé par le gouvernement pour soutenir cette industrie, par ailleurs encouragée par des dispositifs existants, tels que le crédit impôt recherche ou des pôles de compétitivité comme Systematic ou Images et Réseaux. La nanoélectronique, les technologies de base du numérique, les “smart grids”(1), le “cloud computing”(2), sont autant de sujets sur lesquels j’attends des propositions précises et rapides de l’industrie de l’électronique. Le lancement, courant juin, d’une grande consultation publique sur le volet des usages, des contenus et des applications dans le cadre des investissements d’avenir sera l’occasion pour cette filière de s’exprimer clairement.
J’ajoute que d’autres sujets d’investissement, dans le développement durable, avec la voiture électrique par exemple, ou encore dans le calcul haute performance, doivent impliquer nos champions et nos PME de l’électronique. Nous veillerons, avec Christian Estrosi [le ministre en charge de l’industrie, ndlr] et René Ricol, le Commissaire général aux investissements, à ce que l’ensemble du tissu industriel de l’électronique soit partie prenante de cette dynamique.
Quels sont, selon vous, les chantiers prioritaires et les enjeux sociétaux que le gouvernement pourrait soutenir dans le domaine de l’électronique ? Les professionnels souhaitent notamment s’investir sur les dossiers de la télésanté, de la confiance numérique, de la sécurité et de l’environnement. Etes-vous prête à les soutenir en ce sens ?
Nathalie Kosciusko-Morizet : J’ai cité quelques exemples, que vous complétez fort justement. La résilience des réseaux me semble être une piste formidablement intéressante. La résilience, c’est un problème d’infrastructure, d’architecture logicielle, et bien entendu, d’équipement, donc d’électronique. Il y a des choix à faire aujourd’hui qui engageront l’avenir, et ce marché est par nature, au minimum, européen. J’attends beaucoup de la filière française dans ce domaine. J’entends soutenir les professionnels, mais pour cela, il faut qu’ils s’organisent en consortium et présentent des propositions innovantes, afin que nous puissions, avec René Ricol, retenir les meilleurs projets. Je rappelle néanmoins les deux critères essentiels pour la sélection des projets : qu’ils soient créateurs d’emplois et qu’il y ait un retour sur investissement pour l’État.
Propos recueillis par Jacques Marouani
(1) Réseaux de distribution d’électricité “intelligents”.
(2) “Informatique en nuages” visant l’utilisation de la mémoire et des capacités de calcul des ordinateurs et des serveurs répartis dans le monde entier.
Crédit photo : Arnaud perrin
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