C’est ce qu’ont indiqué des intervenants à une conférence sur le thème des achats de composants électroniques, qui s’est tenue hier, 2 octobre, à la FIEEC.
Hier, 2 octobre 2018, s’est tenue, à la FIEEC, une conférence intitulée « Bien choisir et bien acheter dans le secteur électronique : une collaboration de toute la filière », organisée par l’Acsiel, le Snese et le SPDEI. Conférence de circonstance puisque sévit depuis début 2017 une pénurie de composants qui devrait durer jusqu’à l’année prochaine.
Eric Burnotte, président du Snese, a d’emblée dressé un tableau de la situation : « Cette crise mondiale est inédite de par sa durée, son ampleur et les catégories de composants concernées… Et nous y avons tous une responsabilité ».
La pénurie en question concerne au premier chef les condensateurs céramique multicouches (MLCC), les chips résistifs, les discrets (notamment encapsulés en boîtiers SOT 23) et les MOSFET. Et elle devrait durer. Selon Pascal Fernandez, président du SPDEI, il faut s’attendre, en 2019, à des tensions sur tous les composants précités ainsi que sur certaines mémoires.
Outre les boîtiers SOT 23 (pour les discrets), les gros boîtiers de condensateurs se raréfieront. Il faut s’attendre à une baisse de la production de boîtiers de taille supérieures à 0402, selon Fabrice Lecordier (TTI). « Les fabricants de condensateurs vont se focaliser sur les petits boîtiers», renchérit Alain Lafuente (Würth Elektronik). Or, les alimentations à découpage, par exemple, utilisent des condensateurs de découplage en boîtier 1210 !
Les raisons
Les raisons à cette pénurie sont multiples. D’abord, il y a l’avènement de nouveaux marchés. L’iPhone 10 contient quelque 10000 condensateurs céramique ; la voiture, 4000 (et 20 000 par la suite). Et, bientôt, il y aura la diffusion du véhicule électrique, l’émergence de l’automobile autonome et l’arrivée de la 5G.
Côté offre, en ce qui concerne les composants passifs, il y a eu une diminution régulière des prix, d’où des marges faibles, insuffisantes en tout cas pour permettre aux fabricants d’investir. Or, il faut de l’ordre de 100 millions de dollars pour installer une usine de passifs.
Le manque de prévision a été évoqué par tous les intervenants. Jean-Luc Estienne, président d’Acsiel, constate ainsi que « les révisions à la hausse successives concernant le marché mondial des semi-conducteurs témoignent d’un manque de visibilité ». « Les clients de la sous-traitance fournissent de moins en moins de prévisions », constate, à son tour, Eric Burnotte.
Ce qui fait que les sous-traitants ne peuvent pas fournir de prévisions aux distributeurs et aux fabricants de composants. Il semblerait qu’il y ait là une spécificité française qui tranche sur les comportements constatés en Allemagne et en Italie, selon MM. Burnotte et Lecordier. « En Allemagne et en Italie, les mesures de réaction à la pénurie ont été plus vite mises en place… En France, ce n’est qu’au 2ème semestre 2017 que les clients se sont émus…», remarque Fabrice Lecordier.
Les remèdes
Pour remédier à cette pénurie, la première des choses à faire pour tous les acteurs de cette supply chain est d’améliorer la communication et la transparence : les clients doivent ainsi faire davantage confiance à leurs fournisseurs de composants de façon à obtenir des conseils avisés ; les fabricants de composants doivent fournir toutes les notifications de fin de vie et d’arrêt de production, etc. Et pour mieux communiquer, toutes ces entreprises ont intérêt à davantage utiliser une communication numérisée et standardisée.
La prévention des problèmes passe aussi par une utilisation plus importante de secondes sources, même s’il faut pour cela que le sous-traitant négocie âprement avec le client la levée de certaines restrictions. Elle passe aussi par l’utilisation par le bureau d’études de composants alternatifs aux composants sous allocation. Les condensateurs polymère peuvent, par exemple, moyennant des adaptations, remplacer des condensateurs céramique à délais d’obtention 50 ou 60 semaines…
Enfin, il faut que les clients aient en tête que chaque domaine (semi-conducteurs, passifs, électromécaniques, de connectique et circuits imprimés), a ses règles propres, ainsi que l’a souligné Jean-Luc Estienne.