Prendre un verre en main, envoyer un mail, autant de gestes du quotidien qui sont impossibles pour des personnes atteintes de handicaps physiques graves, même si leur cerveau veut et peut commander ces gestes. Les projets tels que Tobi (outils d’interaction cerveau-ordinateur), financés par l’Union européenne, reposent sur des technologies qui pourraient améliorer sensiblement la qualité de vie des personnes handicapés. L’interaction cerveau-ordinateur ou “Brain Computer Interaction” (BCI) leur permettrait de reprendre le contrôle de leurs membres paralysés, de surfer sur Internet et d’effectuer des promenades « virtuelles » en utilisant leur seule pensée.
« La participation à ce projet m’a montré que je peux encore être utile à la société », a écrit Jean-Luc Geiser, âgé de 53 ans, victime d’un accident cérébral qui l’a laissé complètement paralysé et incapable de s’exprimer. Grâce à Tobi, Jean-Luc est parvenu à communiquer en tapant des messages électroniques au moyen d’un curseur d’ordinateur commandé par ses ondes cérébrales.
Contrairement à des expériences semblables généralement réalisées avec des patients valides ou des implants posés dans le cerveau, Tobi a innové en développant des prototypes non invasifs directement testés par et avec des utilisateurs potentiels.
« De nombreuses personnes souffrant d’un handicap physique à des niveaux divers ne peuvent contrôler leur corps alors que leur niveau cognitif est suffisamment élevé », a déclaré le coordinateur de projet José del R. Millán, professeur à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne.
Impulsions cérébrales dans la pratique
Tobi a fait intervenir au moins trois types de dialogue cerveau-ordinateur, de sorte que des patients paralysés sont parvenus à communiquer et même à bouger.
Le premier type d’interaction consistait à transmettre des signaux émis par le cerveau à un curseur d’ordinateur via des électrodes fixées sur un casque placé sur la tête. Par le simple fait de réfléchir à ce qu’ils voulaient taper, les patients ont pu commander à distance le curseur de l’ordinateur et rédiger des messages électroniques et des textes.
Dans la deuxième expérience, les patients ont utilisé les signaux émis par leur cerveau pour commander un petit robot équipé de capteurs audio et vidéo et d’un détecteur d’obstacles. Ils ont ainsi pu utiliser le robot pour effectuer une promenade « virtuelle » dans l’hôpital ou même retrouver leurs proches à différents endroits.
D’autres patients ont pu retrouver le contrôle de leurs membres paralysés uniquement par la pensée: il leur a suffi de s’imaginer en train d’effectuer un mouvement donné pour qu’un logiciel informatique spécifique détecte leur intention et en assure la réalisation. Dans certains cas, une rééducation et un entraînement intensifs ont aidé les patients à conserver le contrôle du mouvement même après le retrait du dispositif électronique.
Le projet a pris fin l’an dernier et les différents prototypes continuent d’être affinés. Certains équipements sont disponibles pour les patients dans les cliniques et les hôpitaux partenaires de Tobi.
Il a réuni13 partenaires autrichiens, allemands, italiens, helvétiques et britanniques. L’Union européenne a investi 9 millions d’euros dans ce projet au titre programme Horizon 2020.