Conséquence du séisme au Japon, la pénurie de ferrites, de selfs et de condensateurs au tantale progresse, alors que la production de crèmes à braser marque le pas. Les pénuries et les hausses de prix des composants poussent les sous-traitants à des relations plus contractuelles avec leurs clients et leurs fournisseurs.
Jeudi 24 mars, lors de sa dernière assemblée générale, le Snese, syndicat de la sous-traitance française, a fait un point sur les retombées pour la profession du séisme au Japon; le 15 mars dernier, cet organisme avait mis en place une cellule d’informations sur le sujet.
Richard Crétier, porte-parole du Snese, a annoncé que l’arrêt de production d’une usine Murata de l’Archipel allait aggraver la pénurie actuelle de ferrites et de bobines. Ce qu’a confirmé Franck Mouchon de Würth Elektronik en indiquant “une recrudescence de demandes pour des équivalences de ces composants“.
Pierre Bigot (photo), président de ce syndicat, a complété le tableau en prévoyant une aggravation de la pénurie de condensateurs au tantale ainsi que des problèmes à venir pour les crèmes à braser.
En outre, M. Bigot estime que la baisse de production de tranches de silicium consécutive au tremblement de terre dans l’Archipel va amplifier le déficit mondial de semi-conducteurs. D’où des arrêts de fabrication déjà envisagés chez certains fabricants de matériels électroniques (Sony, par exemple).
Par ailleurs, M. Bigot pense que certains donneurs d’ordres pourraient être amenés à retarder leurs demandes de livraisons aux sous-traitants de l’électronique par manque de pièces d’autres domaines (manque de composants carbone, par exemple, dans le cas de donneurs d’ordres de l’aéronautique).
Le Snese a également débattu des conséquences des hausses de prix des composants, notamment des composants passifs, pour la profession. Ces hausses résultent en majeure partie d’une augmentation importante du prix des métaux l’an passé.
Premier constat, les hausses de 2010 se concrétisent surtout aujourd’hui, nombre de fournisseurs ayant pu livrer l’an dernier, à partir de leurs stocks. En particulier, la forte croissance du prix du cuivre (+30 % entre mars 2010 et mars 2011) touche les circuits imprimés et les câbles. L’envolée du cours du pétrole pénalise, elle, les plastiques.
Ces augmentations de prix diminuent les marges des sous-traitants car les clients de ces derniers s’en tiennent au prix fixé lors de la signature du contrat. “En 2010, malgré une progression de chiffre d’affaires (+17 %), la sous-traitance de l’Hexagone a vu sa marge diminuer“, constate ainsi Jean-Marc Attali, Pdg de la société Ose.
Aussi, “depuis 2010, les contrats des sous-traitants contiennent une clause indexant les prix des composants achetés par ces derniers sur les cours des matières premières“, annonce Gérard Guerrin, contrôleur de gestion chez Tech Power Electronics.
Pour les difficultés directement induites par les conséquences du séisme au Japon, les sous-traitants pourront également faire appel à la clause de force majeure. D’une manière générale, les difficultés poussent la profession à insister sur l’aspect contractuel de la relation avec les clients comme avec les fournisseurs.
Parmi les fournisseurs des sous-traitants, figurent les distributeurs qui sont accusés par le syndicat de ne pas respecter leurs engagements quant aux délais, prix et quantités de pièces à livrer. Le Snese rappelle que ces engagements sont confirmés par l’accusé de réception de commandes que le distributeur retourne à son client. Tout non respect de ces promesses constitue, selon le syndicat, une infraction commerciale au titre d’une “pratique commerciale abusive“.
L’organisme représentatif de la sous-traitance française demande également aux distributeurs de composants électroniques de l’Hexagone de se doter de stocks de sécurité de montants équivalents à au moins 20 % des consommations annuelles de leurs clients, ce qui représente un peu plus de deux mois de stock.
Il souhaiterait également que le syndicat français de la distribution, le SPDEI, fournisse des informations sur l’évolution des prix des composants, notamment ceux qui, pour une raison ou une autre, varient le plus (cas des connecteurs et des relais, en ce moment).
In fine, les problèmes de pénurie de composants et d’augmentation des prix de ces derniers sont intimement liés à une désindustrialisation de l’Europe. “Tous les dix ans, il y a ou il y aura un accident d’ordre matériel ou social qui nous rappelle ou nous rappellera que nous avons laissé partir notre industrie“, constate Dominique Pellizzari, nouvel expert en circuits imprimés auprès du Snese.
“Aujourd’hui, moins de 10 % des composants électroniques assemblés sur une carte sont fabriqués en Europe“, renchérit M. Bigot. “Il manque à nos pays une politique industrielle“, concluent MM. Bigot et Pellizzari.