LES DÉTECTEURS MEMS DE COMPOSÉS ORGANIQUES VOLATILS EN INTÉRIEUR GAGNENT EN PRÉCISION ET EN FONCTIONNALITÉS, ET AVEC EUX LES PURIFICATEURS D'AIR, LES SYSTÈMES DE CLIMATISATION ET DE VENTILATION, LES HOTTES ASPIRANTES ET LES STATIONS ENVIRONNEMENTALES DOMESTIQUES.
Malheureusement, la pollution est un marché d'avenir. Et les effets de la catastrophe climatique en cours ne sont pas les seules menaces : à l'intérieur des foyers, des appareils de chauffage ou de cuisson mal réglés peuvent nuire à la qualité de l'air et s'avérer désagréables, voire dangereux. Les fabricants de semi-conducteurs multiplient donc les capteurs de gaz, à commencer par les modèles Mems plus facilement intégrables et miniaturisables que les capteurs chimiques que l'on retrouve dans l'industrie.
Ce détecteur de composés organiques volatils de Renesas utilise des algorithmes dérivés de l'intelligence artificielle pour reconnaître des gaz spécifiques.
En 2014, le fabricant de capteurs ams rachetait à cet effet Applied Sensors, spécialiste allemand des capteurs de gaz (CO, NO, 2 NH, CH, etc.) fondé en 3 4 2000. L'autrichien entendait alors étendre son catalogue de détecteurs avec l'espoir de faire entrer les capteurs de gaz dans des applications à fort volume. Subissant la déprime du marché des smartphones et notamment d'Apple, ams changeait son fusil d'épaule en 2019 en annonçant la création, avec le consortium financier chinois Wise Road Capital, d'une société commune reprenant les références, la R&D, les ventes et la force de travail relatives à ses capteurs de gaz mais aussi de pression, de flux (y compris les modèles à ultrasons pour compteurs intelligents) et de données environnementales (qualité de l'air, humidité relative, température). Baptisée ScioSense et basée à Eindhoven (Pays-Bas), la société commune (détenue majoritairement par Wise Road Capital) et dirigée par l'ancien CEO d'Applied Sensors, Stefan Raible, refait aujourd'hui parler d'elle. ScioSense présente en effet un capteur de gaz miniature de qualité de l'air annoncé comme étant le plus précis de sa catégorie.
TRAITEMENT DU SIGNAL INTÉGRÉ
L'ENS160 comprend quatre capteurs Mems métal-oxide à plaque chauffante dont la résistance équivalente change en présence de composés organiques volatils ou VOC (volatile organic compounds) comme l'éthanol, le méthane, le toluène, le dioxyde de soufre ou le monoxyde de carbone. Le capteur en déduit la concentration en dioxyde de carbone, qui est le plus souvent corrélée à la présence de VOC en intérieur. Des algorithmes sophistiqués de fusion de signaux exécutés en interne assurent la mise en forme des résultats tout en compensant les effets de l'humidité ambiante. De plus, une fonction de correction automatique permet de réinitialiser les mesures, assurant que l'ENS160 témoigne des variations de la qualité de l'air quelles que soient les conditions de départ. Sa résistance à la contamination aux siloxanes lui assure une durée de vie plus longue, par exemple dans des purificateurs d'air, des systèmes de climatisation et de ventilation, des hottes aspirantes ou encore des stations environnementales domestiques.
L'ENS160 produit trois sorties distinctes. La première recense les composés organiques volatils (VOC). La deuxième correspond à l'indice eCO 2 couramment utilisé pour mesurer la qualité de l'air. La troisième délivre différents indices de qualité de l'air compatibles avec les standards internationaux, notamment l'indice AQI-UBA originaire d'Allemagne mais adopté par de nombreux pays. Tous ces indices sont compensés en température et en humidité directement sur le composant. Les utilisateurs souhaitant appliquer leurs propres algorithmes de traitement du signal peuvent également accéder aux données brutes issues des quatre éléments sensibles. ScioSense assure de plus avoir réduit le délai de démarrage de son capteur, qui serait désormais le plus rapide du marché. L'ENS160 est encapsulé dans un boîtier LGA montable en surface de 3 x 3 x 0,9 mm et communique par l'intermédiaire d'une interface série I²C. Il sera disponible sous forme d'échantillons au premier trimestre 2021, de même que des kits d'évaluation. Les applications visées sont résolument grand public : le capteur donne ses meilleurs résultats dans un environnement intérieur « normal » (température comprise entre - 5 °C et + 60 °C, humidité relative de 20 % à 80 %, absence de gaz agressifs ou dangereux).
DES CAPTEURS WATERPROOF
Mais ScioSense n'est pas le seul à proposer des capteurs de gaz compacts pour applications grand public. On citera par exemple le BME680 de Bosch Sensortec, qui embarque dans le même encombrement des capteurs de gaz VOC, d'humidité, de température et de pres-sion barométrique. Renesas Electronics vient également d'améliorer son capteur de qualité de l'air ZMOD4410, hérité d'IDT, avec une version encapsulée dans un boîtier waterproof conforme à la norme IP67 – une première pour un circuit programmable de cet acabit selon le japonais. Ce détecteur convient donc aux environnements exposés aux liquides aqueux et huileux et à la poussière tels que les cuisines, les salles de bains ou les chambres d'hôpital. Les éléments sensibles du ZMOD4410 sont désormais protégés par un matériau à la fois hydrophobique et oléo-phobique, mais perméable à l'humidité et aux composés organiques volatils. « Insérer ce type de capteurs précis dans des environnements humides et poussiéreux nécessite générale-ment d'ajouter des composants matériels et logiciels ; la version waterproof du ZMOD4410 permet désormais de le faire de manière simple et économique, et donc de démocratiser l'usage de ce genre de détecteurs », espère Uwe Guenther, directeur des capteurs pour infrastruc-tures et objets connectés chez Renesas Electronics. À noter que cette nouvelle protection contre les liquides et les poussières ne génère qu'un très léger embonpoint du boîtier, qui passe de 3 x 3 x 0,7 mm à 3 x 3 x 0,9 mm.
ScioSense englobe les capteurs de gaz mais aussi de pression, de flux et de données environnementales que l'autrichien ams a externalisés en 2019.
Le ZMOD4410 délivre en sortie des indices de concentration de gaz VOC et une estimation eCO de la présence de 2 dioxyde de carbone. Comme chez ScioSense, les éléments sensibles sont des structures métal-oxide micro-usinées dont la résistance est modifiée par la présence de certains composés gazeux. Le ZMOD4410 se distingue par sa programmabilité : concrètement, il est possible de mettre à jour son firmware pour répondre à tel ou tel standard ou pour effectuer des mesures sélectives (concernant par exemple les composés soufrés ou les odeurs désagréables) au moyen d'algorithmes basés sur l'intelligence artificielle et disponibles auprès du japonais. La résolution de la conversion analogique-numérique est également ajustable jusqu'à 16 bits, afin de privilégier la précision ou la rapidité des mesures.
Également présent sur ce marché, le suisse Sensirion a récemment lancé le SGP40, un détecteur de composés VOC destiné lui aussi à la mesure de la qualité de l'air en intérieur et basé, comme les modèles de ScioSense et Renesas, sur des éléments sensibles métal-oxide. Le SGP40 délivre des données brutes numérisées sur 16 bits ainsi qu'un indice de qualité de l'air VOC via une interface I²C. L'indice est obtenu grâce à un algorithme embarqué d'analyse des composés organiques volatils avec compensation en température et en humidité. Il s'agit de la seconde génération de capteurs de qualité d'air chez Sensirion : pour l'occasion, le suisse a amélioré plusieurs caractéristiques, par exemple la consommation typique (2,6 mA/6 MW) et la variation d'une puce à l'autre.