L’électronique française doit se réorganiser d’urgence

Le 24/07/2019 à 0:00 par La Rédaction

Soit l'industrie électronique française se réorganise en profondeur et rapidement, soit elle risque de connaître des années difficiles. C'est ce qui ressort d'un rapport mené par le cabinet In Extenso pour le compte de la DGE et des syndicats de l'électronique, dont les conclusions ont été dévoilées le 12 juin dernier à Bercy.

= C'est de l'avenir de la production électronique française dont il était question, lors de la réunion du Pipame dédiée à l'électronique qui s'est tenue le 12 juin dernier à Bercy, devant les représentants de la profession.

L e 12 juin dernier, les prin-cipaux représentants de l'électronique française étaient réunis au ministère de l'Économie et des Finances afin d'assister à la restitution de l'étude Pipame (Pôle Intermi-nistériel de Prospective et d'Anticipation des Mutations Économiques) sur le devenir de la production électronique en France. À l'initiative de la DGE (Direction générale des entreprises) et de plusieurs syndicats de l'électronique (Acsiel, Fieec, Snese, SPDEI), cette étude a été menée par le cabinet In Extenso Innovation Croissance (IEIC) avec le Pôle Solutions Communicantes et sécurisées (SCS). Complétée par des témoignages d'industriels français de l'électronique et d'entreprises utilisatrices, ainsi que par une table ronde animée par la revue Electroniques et consacrée à la production électronique en France, la restitution de l'étude Pipame par le cabinet In Extenso constituait le point d'orgue de cet après-midi qui a débuté par un message vidéo très enthousiaste d'Agnès Pannier-Runa-cher, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances. La ministre a notamment rappelé la prise de conscience par les pouvoirs publics de l'importance de l'électronique dans l'économie française via la création du Comité stratégique de filière l'an dernier.

Des atouts et des inconvénients

In Extenso a scindé son étude en deux parties: une première partie axée sur l'état des lieux actuel de la production électronique en France et une seconde, plus prospective, consacrée à son évolution sur la période 2020-2025. Dans la première partie, In Extenso indique avoir répertorié 1 033 sites dédiés à l'électronique en France parmi lesquels 93 bureaux d'études, 187 fabricants de composants, 524 sous-traitants (soit plus de la moitié des sites identifiés), 69 distributeurs et 160 fournisseurs d'équipements de test et mesure (et des consommables associés). Le tout représentant un chiffre d'affaires cumulé de 15 milliards d'euros, une valeur ajoutée de 4,6Mde, 400Me de bénéfices cumulés et quelque 70 000 salariés (dont plus de 48,3 % chez les fabricants de composants et 36,5% en soustraitance), selon les chiffres de l'année 2017. Pour In Extenso, ces chiffres mettent en exergue à la fois les atouts et les écueils de la filière électronique en France. Atouts car l'électronique française compte en ses rangs tous les maillons de la chaîne de valeur, ce qui lui permet de développer une production solide en matière de petites et moyennes séries et ainsi de fournir de manière effi-cace bon nombre de débouchés industriels (mil/aéro, automobile, énergie, industrie, etc.). Inconvénients car l'électronique française représente désormais à peine 2 % de la production mondiale, la conséquence d'une politique fabless largement prônée dans les années 2000 et qui s'est révélée néfaste.

Trois scénarios possibles identifiés

Pour l'avenir à court et moyen termes (période 2020-2025), le cabinet d'études pointe les perspectives de croissance intéressantes du fait de l'intégration de plus en plus poussée de l'électronique dans de multiples secteurs applicatifs, tant pour les débouchés historiques (par exemple, l'automobile avec le véhicule autonome, l'industrie avec l'industrie 4.0, etc.) que pour de nouvelles applications liées, notamment, aux objets connectés. Mais ce potentiel de croissance ne doit pas occulter les défis de taille qu'il faudra surmonter, selon l'analyste, parmi lesquels on peut citer la pression sur les coûts de production, l'arrivée de nouveaux types de clients (dont certains ne sont pas forcément aguerris aux technologies de l'électronique) ou bien encore la nécessité de s'intégrer à un écosystème large permettant de répondre à de nouveaux besoins, etc. C'est dans ce contexte qu'In Extenso envisage trois scénarios possibles pour l'avenir de la production électronique française : un statu quo assumé, une stratégie basée sur l'agilité et l'excellence technologique et enfin, un remembrement accéléré de la filière. Pour l'analyste, c'est très clair : point de salut pour l'avenir de la production électronique en France en dehors du scénario n°3, c'est-à-dire le scénario d'urgence basé sur un changement radical de logiciel, les deux autres scénarios étant jugés « néfaste » pour le premier et «trop prudent» pour le second. Le cabinet prône ainsi une réorganisation en profondeur et à court terme de l'électronique française pour améliorer sa compétitivité et répondre aux besoins des donneurs d'ordres, qu'ils soient historiques ou nouveaux. Cette mutation de la filière s'articulerait autour d'une restructuration industrielle et capitalistique à l'échelle nationale, d'un développement rapide des capacités d'investissement (ce qui suppose le développement d'une ingénierie financière ad hoc ) et d'un déploiement de nouvelles formes de coopération entre les acteurs de la chaîne. Reste maintenant à voir si les actions qui seront menées dans les mois à venir par les acteurs de la filière électronique française et les pouvoirs publics iront ou non dans ce sens.

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