Couverture ElectroniqueS n°127

Établissant un nouveau record de fréquentation avec 80 000 visiteurs, l'édition 2018 d'Electronica a fait la part belle aux applications industrielles et automobiles et a été l'occasion de faire un point sur la pénurie de condensateurs MLCC. ANNÉE RECORD POUR ELECTRONICA > Electronica 2018 a atteint un nouveau record de fréquentation avec 80 000 visiteurs (+10 % par rapport à l'édition 2016) provenant de 80 pays différents. > Les plus gros contingents de visiteurs provenaient, par ordre d'importance, d'Allemagne, d'Italie, d'Autriche, du Royaume-Uni, de France, de Suisse, des États-Unis, de Russie, de Chine et de Pologne. > Le nombre d'exposants est également orienté à la hausse avec pas moins de 3 100 sociétés exposantes (+ 8 %) issues d'une cinquante de pays. > Les sociétés exposantes provenaient, dans l'ordre, d'Allemagne, de Chine, de Taïwan, des États-Unis et du Royaume-Uni. > La surface d'exposition a été augmentée de 20 % par rapport à l'édition 2016, soit 4 halls supplémentaires, dont un qui accueillait Silicon Europa. > Silicon Europa a désormais lieu en parallèle d'Electronica les années paires et de Productronica les années impaires. > Rendez-vous est d'ores et déjà pris pour l'édition 2020 qui se déroulera à Munich du 10 au 13 novembre. S i l'on en croit les chiffres fournis par l'organisation du salon, la cuvée 2018 d'Electronica a été un succès, au point d'atteindre un nouveau record de fréquentation avec 80 000 visiteurs (+10% par rapport à l'édition 2016) provenant de quelque 80 pays différents, les plus gros contingents arrivant, par ordre d'importance, d'Allemagne, d'Italie, d'Autriche, du Royaume-Uni, de France, de Suisse, des États-Unis, de Russie, de Chine et de Pologne. Du côté des exposants, la fréquentation était également orientée à la hausse avec pas moins de 3 100 sociétés exposantes (+ 8 %) issues d'une cinquante de nationalités dont les plus représentées étaient l'Allemagne, suivie de la Chine, de Taïwan, des États-Unis et du Royaume-Uni. Il faut dire que les organisateurs n'ont pas lésiné sur les moyens pour redresser la barre après une édition 2016 quelque peu miti-gée. Ce rebond s'est fait au prix d'une surface d'exposition aug-mentée de 20 % (soit 4 halls supplémentaires, dont un qui accueillait Silicon Europa), d'une réorganisation des halls en termes de thématiques et de plusieurs nouveautés. Des nouveautés pour dynamiser le salon Avec 80 000 visiteurs (+10 %) et 3 100 exposants (+8 %), l'édition 2018 d'Electronica établit un nouveau record de fréquentation qui tranche avec le résultat quelque peu mitigé de la précédente édition. Ainsi, Electronica a-t-il tenté de redorer le blason de l'industrie électronique auprès des jeunes avec son Electronica expe-rience (Hall C6), un lieu d'échange entre exposants, visiteurs, étudiants, lycéens et collégiens, autour des nouvelles applications et des métiers de l'électronique, de démonstrations interactives et de propositions d'offres d'emploi ou de formation. Autre nouveauté de cette édition 2018, le lancement de l'Electronica Medical Electro-nics Conference (eMEC), qui, comme son nom l'indique, était consacrée à l'électronique appliquée au médical et avait pour thème principal « L'humain connecté : une meilleure santé grâce à l'électronique et aux données ? ». Sorte d'étape ultime d'un monde ultra-connecté : après l'IoT, l'IoH ( Internet of Humans ) ? Enfin, il est important de noter que Semicon Europa, salon dédié à la production des semi-conducteurs et de l'électronique imprimée et organique, qui s'est tenu, un temps, en alternance entre Dresde et Grenoble, s'est déroulé pour la première fois cette année dans le cadre d'Electronica (Hall A4). Les organisateurs ont d'ores et déjà annoncé que ce partenariat sera reconduit pour l'édition 2020. Semicon Europa a initié depuis 2017 un partenariat similaire avec le salon Produc-tronica pour les années impaires. Et bien sûr, les désormais traditionnels Electronica Automotive Conference (eAC), Electronica Embedded Plat-forms Conference (eEPC) et Wireless Congress, mis en place depuis quelques années (de même que 16 autres forums thématiques), ont été renouvelés avec succès lors de cette édition 2018 d'Electronica. L'automobile et l'industrie toujours à l'honneur < Plusieurs sociétés n'ont pas hésité à exposer des voitures de course tout-électrique pour illustrer leur implication dans les composants SiC. C'est notamment le cas de ST qui a présenté la Robocar, une voiture de course 100% électrique, sans pilote ! Parmi les grandes thématiques abordées, le salon a, entre autres, mis l'accent sur l'intelligence artificielle appliquée à l'électronique. Au point que l'IA était au cœur du débat lors de la traditionnelle table ronde inaugurale des Pdg ( CEO round table ) sur laquelle nous reviendrons plus largement dans un prochain numéro d' Electroniques et qui a une nouvelle fois rassemblé une belle brochette de dirigeants de grands groupes mondiaux de l'électronique, avec la présence de Jean-Marc Chery, Pdg de STMicroelectronics, de Dean Ding, directeur technique de la division IoT d'Alibaba, d'Alexander Kocher, directeur général d'Elektrobit, de Reinhard Ploss, Pdg d'Infineon Technologies, de Walden Rhines, Pdg de Mentor (désormais filiale de Siemens) et de Kurt Sievers, fraîchement promu président de NXP Semiconductors. En matière d'applications, même si Electronica tente de se diversifier en faisant le forcing sur des débouchés tels que le médical, il n'en demeure pas moins que le secteur industriel et plus encore l'automobile, restent plus que jamais des thèmes phares de la manifestation. Certains exposants l'ont bien compris, à l'image d'un STMicroelectronics qui a partagé son stand en deux zones dédiées à ces deux applications et où étaient présentés de nombreux démonstrateurs utilisant les composants du groupe franco-italien (microcontrôleurs, capteurs, composants à base de SiC, etc.). Dans la partie « Smart Factory » de son stand, ST exposait notamment un démonstrateur de centre de contrôle d'une usine utilisant des technologies de surveillance des conditions opérationnelles et de maintenance prédictive pour le monitoring des vibrations des équipements industriels à l'aide de solutions d'intelligence artificielle implémentées sur des microcontrôleurs STM32. Dans la partie « Smart Driving » du stand ST, les regards étaient surtout portés sur la spectaculaire Robocar, une voiture de course 100% électrique et 100% autonome (donc sans pilote) qui intègre notamment des composants en carbure de silicium (SiC) signés ST. L'idée est d'organiser des courses de voitures électriques sans pilote (Roborace) en marge de l'actuel championnat de Formule E, sorte de Formule 1 tout-électrique évoluant sur des circuits urbains. Chaque équipe concourant à la Roborace disposerait du même véhicule, avec les mêmes équipements (deux radars, cinq lidars, six caméras à reconnaissance de formes, deux capteurs de vitesse optiques, dix-huit capteurs à ultrasons, un GPS, une carte Nvidia ainsi que quatre moteurs de 300 kW chacun alimentés par une batterie de 540 kW). La différence vient uniquement de la possibilité pour les équipes de modifier les algorithmes qui gèrent l'accélération, le freinage et la direction du véhicule. Bref, ce n'est plus le pilote qui fait ici la différence (les puristes de la course automobile vont crier au scandale), mais la qualité de l'algorithme d'intelligence artificielle mis en œuvre par les équipes. Pour l'heure, seules des démonstrations sur circuit ont eu lieu, mais un véritable championnat devrait être lancé en 2019. La formule E, vitrine des composants en SiC STMicroelectronics n'était pas le seul à mettre en avant ses composants en SiC via l'exposition de voitures de course tout-électrique. C'était par exemple le cas de Rohm – qui a notamment présenté un tout nouveau module de puissance SiC 1700V - très impliqué dans le championnat de Formule E grâce à son partenariat technologique avec l'équipe Venturi. En plus de la présentation sur son stand d'une voiture de Venturi, Rohm a réussi le tour de force de convier à sa conférence de presse l'ancien pilote de Formule 1 Felipe Massa, (vice-champion du monde 2008 avec Ferrari, 11 victoires en carrière), fraîchement reconverti à la Formule E en deve-nant le pilote vedette de l'équipe Venturi. « Le challenge de la Formule E est complètement différent de celui de la Formule 1, mais les progrès réalisés en termes de performances et d'autonomie sont énormes depuis le lancement de ce championnat il y a cinq ans , précise Felipe Massa. Et rien n'empêche de penser aujourd'hui que la Formule E pourrait un jour détrôner la Formule 1 ». Au-delà du secteur de l'automobile et des composants SiC, les solutions d'électronique de puissance et de conversion d'énergie ont clairement fait l'actualité de l'édition 2018 d'Electronica ( voir notre article en page 47 ). Le point sur la pénurie de composants La manifestation munichoise était également une occasion unique pour faire le point sur la sévère pénurie qui existe actuellement au niveau de cer-tains composants, en particulier auprès des fournisseurs de condensateurs céramique mul-ticouches (MLCC, Multi-Layer Ceramic Capacitor ). Notre tour des stands a débuté par le géant américain des condensa-teurs MLCC, Kemet, qui ne nous a malheureusement pas donné de réponse précise sur le sujet. « Il s'agit d'un sujet sensible et complexe qu'il est difficile de résumer en quelques phrases car chaque cas est différent, mais c'est vrai que les visiteurs du salon nous interrogent beaucoup à ce sujet », s'est contenté de nous dire un membre du staff de Kemet présent sur le stand. Notre visite sur le stand de RMComponents, en revanche, s'est avérée particulièrement intéressante du fait de l'éclairage que porte cette société sur la situation. Ce distributeur allemand présente en effet la particularité de ne s'occuper que de deux fabricants de composants, en l'occurrence le japonais Taiyo Yuden et le taïwanais Holy Stone. Or le premier est un fournisseur de MLCC principalement dédiés aux applications grand public alors que le second a fait des MLCC pour applications industrielles sa spécialité. Ce qui permet à RMComponents de disposer d'une vision assez fine de la situation. « La pression impo-sée par les groupes d'électro-nique grand public sur les fournisseurs tels que Taiyo Yuden est très forte, ce qui pousse ces derniers à privilégier la production de condensateurs MLCC de petites dimensions, dont les applications grand public sont friandes, au détriment des modèles en plus gros boîtiers surtout utilisés dans les applications industrielles, et notamment dans l'automobile. Cette situation profite à d'autres fournisseurs, comme Holy Stone, souvent moins importants et moins connus, mais qui sont spécialisés dans les condensateurs MLCC à vocation industrielle et peuvent fournir plus rapidement ces secteurs et ainsi voir leurs ventes augmenter. Cela d'autant que la demande en condensateurs MLCC est de plus en plus forte dans l'automobile du fait du développement des véhicules électriques ou hybrides, notamment. Mais ces fournisseurs spécialisés n'ont pas forcément les épaules pour investir massivement et accroître leur capacité de production, sans compter qu'il faut parfois deux ans pour se faire livrer un équipement de production dédié. C'est un cercle vicieux », analyse Fabian Wonnenberg, technico-commercial chez RMCom-ponents. Un éclairage qui explique non seulement la situation de pénurie actuelle, mais également le fait qu'elle risque de durer encore longtemps. « Sur certains modèles de condensateurs MLCC, les délais affichés sont parfois de 40, voir 50 semaines, au lieu de 10 semaines dans une situation normale », précise M. Wonnen-berg. Pas d'amélioration avant 2020 La pénurie de composants, et notamment de condensateurs céramique multicouches (MLCC), a été l'un des principaux sujets de conversation entre fournisseurs de ce type de composants et visiteurs. Chez Knowles, on confirme également que, globalement, la situation de pénurie pour ce type de composants ne devrait pas connaître d'amélioration notable avant 2020, au mieux. Mais le britannique affirme mieux s'en sortir que la concurrence. « Nous nous en sortons relativement bien avec des délais de l'ordre de 17 semaines qui sont certes en hausse par rapport aux 9 semaines constatées en 2017, mais qui restent tout à fait raisonnables au regard de ce que l'on observe actuellement. Cela ne nous empêche pas de continuer à investir dans de nouvelles capacités de production car les délais s'allongent. Nous avons ainsi récemment décidé d'accroître notre capacité de production de l'ordre de 30 %, mais ce surplus ne sera effectif qu'autour de la mi-2019 », indique Dan Gaffney, directeur marketing global de Knowles. Sur le stand d'AVX, Oliver Zimmermann, en charge du support technique du fabricant japonais, confirme qu'en effet, « aucune amélioration n'est à attendre avant 2020 car la plupart des augmentations de capacité de production ne seront pas effectives en 2019 . » M. Zimmermann tient cependant à préciser qu'AVX « continue à jouer sur les deux tableaux en maintenant une production importante aussi bien dans les MLCC en petits boîtiers que dans les modèles en plus grands boîtiers, tout simplement parce que AVX est très impliqué dans le domaine de l'automobile ». Chez Murata, un autre géant des condensateurs MLCC, on confirme des délais de livraisons « non raisonnables » même si des investissements importants sont en cours. « Murata est l'un des seuls grands fournisseurs de MLCC à continuer à investir massivement dans ses capacités de production. Mais pour qu'un investissement se traduise en une unité de production opérationnelle, il faut environ un an , constate Olivier Gaborieau, Product Line Manager chez Murata Integrated Passive Solutions, société d'origine française connue auparavant sous le nom d'IPDiA, avant son rachat par le géant japonais il y a deux ans. D'où l'idée de trouver une technologie alter-native aux MLCC pour pallier, au moins en partie, cette pénurie. « Notre technologie de condensateurs intégrés sur silicium constitue une alternative crédible aux MLCC dans certaines applications industrielles, d'autant qu'elle est particulièrement fiable », précise M. Gaborieau. Chez Panasonic aussi, on érige une autre technologie de condensateurs en alternative aux condensateurs céramique multicouches, à savoir les gammes SP-CAP et POSCAP de condensateurs en polymère d'aluminium du fabricant japonais. Mais même si ces solutions constituent des alternatives intéressantes à considérer sérieusement dans la situation actuelle de pénurie de condensateurs MLCC, il est important d'étudier minutieusement les différents paramètres à prendre en compte en fonction de l'application (performances des composants, encombrement, comportement dans l'environnement de l'application, etc.) avant d'opter pour une nouvelle technologie de condensateurs.

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