Couverture ElectroniqueS n°127

EXPANSION INTERNE, RECOURS ÉLARGI À DES FONDEURS EXTERNES, DÉVELOPPEMENT DE SA PROPRE ACTIVITÉ FONDERIE : LE NUMÉRO UN MONDIAL DES SEMICONDUCTEURS ENTEND JOUER SUR TOUS LES TABLEAUX POUR GARDER SON TRÔNE. Le nouveau CEO d'Intel, Pat Gelsinger, communique tous azimuts pour présenter les axes de la future stratégie du fabricant de processeurs. Il ne s'agit pas seulement de marquer son territoire, mais surtout de faire oublier les retards successifs rencontrés par ses sites de production au cours des dernières années. Ces retards ont en effet passablement écorné l'image de marque d'Intel qui avait même cédé l'espace de quelques trimestres particulièrement propices aux mémoires, sa place de numéro un mondial des semi-conducteurs à Samsung. Fin mars, Pat Gelsinger a donc détaillé ses ambitions en termes de stratégie industrielle en se voulant à la fois rassurant et ambitieux et en invoquant les heures fastes du numéro un mondial des semi-conducteurs. La volonté de produire la majorité de ses circuits intégrés en interne – modèle historique d'Intel dont la pérennité n'était plus si assurée récemment – se trouve clairement réaffirmée. Le fabricant va ainsi construire deux nouvelles usines de semi-conducteurs en Arizona, sur son campus d'Ocotillo, à Chandler (banlieue sud-est de Phoenix), où il exploite déjà plusieurs lignes de production, pour un investissement total avoisinant les 20 milliards de dollars. Ces deux usines emploieront plus de 3 000 salariés directs (la plupart très qualifiés) et en mobiliseront autant pour leur construction, pour une retombée globale évaluée à 15 000 emplois indirects (services, commerces, etc.). Nul doute que le choix de l'Arizona, très en vogue actuellement (le fondeur taïwanais TSMC y investit 12 Md$ d'ici à 2029 pour se construire une usine de production en 5 nm), est lié à des avantages fiscaux consentis par l'administration locale et qui s'ajoutent aux aides fédérales promises par l'administration Biden. De tels investissements tendent en effet à susciter une féroce compétition entre collectivités locales qui rivalisent alors de cadeaux en tous genres, les fameux « incentives » dont se réjouit Pat Gelsinger. Ce dernier estime par ailleurs que la technologie 7 nm d'Intel, attendue de longue date, devrait enfin être utilisée à partir du 2 nd trimestre pour certaines parties des processeurs Meteor Lake, avec un process revu et simplifié et un recours croissant à la lithographie aux ultraviolets extrêmes EUV. En cours d'extension, l'usine irlandaise d'Intel devrait bientôt être la première du continent à produire des circuits en technologie 7 nm. LA FONDERIE INTEL GAGNE EN INDÉPENDANCE Pour autant, il sera fait davantage appel aux fondeurs externes, y compris pour des puces en géométries ultrafines, à compter de 2023. Dans quelle proportion, cela reste à préciser. Intel explique que cet usage accru aux fondeurs externes a pour but d'optimiser les coûts, les performances, les délais et la capacité de production. Il est vrai que la progression actuelle des ventes d'ordinateurs et de serveurs, plus forte qu'à l'accoutumée sur un marché désormais mature, a induit une hausse de la production de processeurs. Mais cette conjoncture favorable reste liée aux conséquences de la pandémie, qui a obligé nombre d'entreprises et de travailleurs à s'équiper pour télétravailler : il ne s'agit pas forcément d'une tendance à long terme. Intel entend également se donner les moyens de devenir un fondeur crédible aux États-Unis et en Europe. Les nouvelles usines d'Ocotillo seront elles-mêmes en partie dévouées aux clients d'Intel. Cette activité de production pour des sociétés tierces sera désormais rassemblée sous l'égide d'une filiale distincte, Intel Foundry Services (IFS), dirigée par Randhir Thakur, l'actuel chief supply chain officer de l'Américain passé préalablement par Applied Materials, SanDisk et Micron. Il s'agit d'un marché évalué à 100 Md$ à l'horizon 2025, pour l'instant concentré en Asie, et pour lequel Intel peine à trouver des clients. L'Europe, elle, est essentiellement concernée par le biais de l'usine irlandaise d'Intel, dans laquelle l'Américain a investi 7 Md$ entre 2019 et 2021 pour en doubler la surface dédiée à la production. Ce site devrait également accueillir une mouture du process 7 nm du fabricant – une première sur le Vieux Continent. Afin de mettre en valeur cette activité fonderie appelée à gagner en importance et en indépendance, Pat Gelsinger a également insisté sur les compétences d'Intel en encapsulation (technologies Foveros et EMIB), mais aussi sur un catalogue d'IP incluant des cœurs x86, des moteurs graphiques, des interconnexions, des accélérateurs IA ou encore, c'est à noter, des IP liées aux environnements Arm et RISC-V.

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