Couverture ElectroniqueS n°127

L'automobile est le principal secteur qui pâtit de l'actuelle pénurie de composants électroniques, en raison d'un ratio volume/marge moins favorable par rapport aux marchés de plus grande ampleur, et du fait que les principaux fournisseurs de semi-conducteurs estiment que la production automobile a rebondi plus rapidement que prévu. L a plupart des constructeurs automobiles ont annoncé qu'ils ont réduit leur production de véhicules depuis le début de l'année en raison d'une pénurie de semi-conducteurs et d'un rebond sensible de la demande après la reprise enregistrée dans des secteurs générant de plus fortes marges. La pandémie de Covid-19 a en effet provoqué une augmentation des besoins en composants électroniques dans d'autres secteurs jugés plus prioritaires par les fabricants de composants électroniques tels que les télécoms, l'informatique et l'électronique grand public : fabricants d'ordinateurs, de téléviseurs, de téléphones portables, d'électroménager ont fait exploser la demande. Le développement de la 5G, de l'intelligence artificielle et de la voiture électrique ont aussi accentué cette pénurie. RETARD DE PRODUCTION DE 672 000 VOITURES Les principaux fournisseurs de semi-conducteurs ont confirmé que la production automobile a rebondi plus rapidement que prévu à la suite de la pandémie, et qu'ils ont du mal à rattraper leur retard dans les livraisons. 'automobile est particulière-ent touchée en raison de son ystème d'approvisionnement flux tendu. Cette pénurie ourrait retarder la production e quelque 672 000 voitures au remier semestre, notamment n Chine et en Europe, selon le abinet IHS Markit. Les géants e l'automobile manquent e composants électroniques our leurs équipements désor-ais indispensables aux voi-ures actuelles : ordinateur de ord, ABS, airbags, GPS, aide u stationnement, verrouillage es portes. Ce secteur, particulièrement important pour l'économie européenne, pâtit de la forte demande de composants destinés aux smartphones et ordinateurs, marchés qui ont été boostés en raison de l'essor du télétravail, phénomène directement lié à la pandémie de Covid-19. Les fabricants de ce type d'équipements ont vu leurs stocks s'amenuiser ces dernières semaines et risquent aux aussi de ne plus pouvoir suivre la demande, notamment en matière de microprocesseurs, de circuits graphiques et d'écrans LCD. Les fournisseurs de semi-conducteurs ont d'abord cru à un essoufflement de la demande lors de l'apparition du Covid-19. Dans le courant de l'année 2020, la capacité de fabrication de semi-conducteurs a donc été réduite à l'échelle mondiale. Mais c'est l'inverse qui s'est produit : la demande d'ordinateurs portables a été forte pour subvenir aux besoins du travail à domicile, et les PC et les consoles de jeu se sont vendus en grandes quantités. Par ailleurs, la décision américaine de mettre sur liste noire le principal fondeur chinois, Smic, a poussé les entreprises de semi-conducteurs à se démener pour trouver de nouveaux partenaires. TOUS LES PRINCIPAUX CONSTRUCTEURS SONT AFFECTÉS L'allemand Volkswagen avait déclaré dès le mois de décembre 2020 qu'il faisait face à une pénurie de semi-conducteurs et qu'il ajusterait la production dans ses installations en Chine, en Amérique du Nord et en Europe. Puis depuis la mi-janvier, tous les principaux constructeurs automobiles ont annoncé souffrir de la pénurie de composants électroniques, allant jusqu'à prendre des mesures de fermetures temporaires d'usines et de chômage partiel partout dans le monde. Début février, à l'usine Renault de Sandouville, près du Havre, et à l'usine Stellantis (ex-PSA) de Sochaux, dans le Doubs, la production de voitures a été fortement perturbée. L'usine Renault de Sandouville a fermé ses portes et a stoppé sa production pour au moins deux jours, les 8 et 9 février 2021. Les composants non approvisionnés empêchaient de poursuivre la production, a confirmé la direction de l'usine lors d'un CSE extraordinaire. La production complémentaire du samedi 13 février, pour satisfaire le carnet de commandes plein pour trois mois, a également été annulée. Quant à l'usine Stellantis de Sochaux, elle a décidé d'instaurer un second samedi non travaillé durant le week-end des 6 et 7 février après celui de fin janvier, a fait savoir la direction du site dans un communiqué. Un comité de suivi de la pénurie supervisé par Bercy En France, les représentants de l'automobile et de la filière électronique ont été reçus par les services de l'État en charge de l'Industrie le 10 février dernier pour une première réunion consacrée à la pénurie de composants électroniques, selon un porte-parole de la Plateforme de la filière automobile (PFA). « L'objectif est de réunir l'ensemble des acteurs pour partager avec les pouvoirs publics la vision la plus large possible de la situation et le suivi à l'échelle des deux filières », a-t-il expliqué. Cette cellule de crise a vocation à se réunir à intervalles réguliers pour faire le point sur l'évolution de la situation. J.M. Le Snese s'insurge des hausses brutales de prix des composants Dès la fin du mois de janvier, le Snese (Syndicat national des entreprises de sous-traitance électronique) se désolait des « annonces de hausses significatives des prix des composants électroniques. Au-delà des simples mises à jour des prix catalogues 2021 des distributeurs qui sont usuelles et attendues, nous constatons des hausses brutales de tarifs, imposées sans concertation, non seulement sur les commandes futures, mais souvent sur tout l'encours des commandes, encore à livrer, déjà contractualisées depuis des semaines, voire des mois. » Les contraintes liées à la hausse des cours des métaux, aux forts rebonds liés à l'informatique ou à l'automobile, à la crise sanitaire, au Brexit ou aux échanges sino-américains n'expliquent pas tout : « Ce qui interpelle aujourd'hui, c'est la violence des hausses, sans compter leur rétroactivité qui bouleverse l'économie ». Et de rappeler que ce sont les clients des sous-traitants qui supporteront ces hausses. A.P. La pénurie de composants élec-troniques touche désormais la plupart des grands constructeurs automobiles mondiaux. Des sites européens de Renault ont également commencé à être affectés. Ford a réduit la production de certains véhicules. General Motors a suspendu la production dans trois usines, aux États-Unis, au Canada et au Mexique. En Chine, certains sites ont décidé de fermer jusqu'à 14 jours. En Allemagne, Volkswagen a interrompu en janvier des lignes de production. Toyota a partiellement arrêté la sienne. Mi-janvier, c'est Honda, déjà, qui avait annoncé fermer son usine en Grande-Bretagne et réduire sa production en Amérique du Nord. Ces difficultés étant loin de se résorber, le gouvernement allemand a pris l'initiative de contacter les autorités taïwanaises pour tenter de trouver une solution. Le ministre de l'Économie allemand, Peter Altmaier, est lui-même intervenu auprès du ministère taïwanais de l'Économie pour qu'il essaie de résoudre cette question d'approvisionnement avec le fondeur TSMC. Trouver une solution à cette pénurie est « d'une importance politico-industrielle majeure » pour ne pas mettre en danger la reprise économique du pays après la pandémie, selon le courrier du ministre cité par la presse allemande. Une action qui semble d'ores et déjà porter ses fruits, puisque TSMC s'est engagé à produire davantage pour le secteur automobile dès cette année. Cette décision fait suite à une demande directe de Wang Mei-Hua, la ministre des Affaires économiques de Taïwan. Jusqu'ici, la production pour le secteur automobile du fondeur était très faible (de l'ordre de 3 % de ses ventes annuelles, malgré une hausse de 27 % au cours du second semestre 2020). Mais TSMC a récemment annoncé qu'il prévoyait d'investir 28 milliards de dollars pour accroître ses capacités de production, investissement qui devrait en partie être destiné à subvenir aux besoins du secteur de l'automobile. UNE TROP GRANDE DÉPENDANCE DE L'EUROPE « La dépendance de l'industrie européenne aux composants électroniques venus d'Asie la rend vulnérable », a regretté le ministre français de l'Économie, Bruno Le Maire, lors d'un point presse en duplex avec le Commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, le 15 février dernier, ce qui accentue les problèmes en cas de pénurie mondiale de semi-conducteurs comme cela est le cas actuellement, car l'Europe génère moins de consommation de composants électroniques, et de ce fait, est moins prioritaire que les autres régions du monde. Aussi, il propose que l'Union européenne adopte « dès cette année » un nouveau projet important d'intérêt européen commun (PIEC) dédié à l'électronique. « La France a déjà identifié 18 projets » qui pourraient être « éligibles » à ce projet, a indiqué Bruno Le Maire. Il estime que l'enjeu devient d'autant plus urgent avec la pénurie de semi-conducteurs. Les États-Unis veillent également à leur souveraineté, le nouveau président américain Joe Biden ayant indiqué que son administration envisageait d'intervenir pour débloquer les chaînes d'approvisionnement, par exemple en développant une production aux États-Unis ou via un renforcement de la « coopération » avec ses partenaires. Cela montre que cette question de souveraineté est directement liée aux retombées d'une pénurie de composants telle que nous la vivons actuellement.

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