Couverture ElectroniqueS n°127

LE FORUM INNOVATION DÉFENSE, QUI S'EST TENU DU 2 AU 4 DÉCEMBRE DERNIER, A PERMIS DE DÉCOUVRIR ET D'ÉCHANGER DANS LES DOMAINES DE L'INNOVATION NÉCESSAIRES AUX FORCES ARMÉES ET À LA NATION : COVID-19, SOLDAT AUGMENTÉ ET PLATEFORME NUMÉRIQUE. À CETTE OCCASION, L'AID A PRESENTÉ DES PROJETS DESTINÉS À MAINTENIR LA SUPÉRIORITÉ OPÉRATIONNELLE DES ARMÉES. Vitrine de l'innovation de défense, le Forum innovation défense a réuni tous les acteurs ministériels et leurs partenaires externes autour de projets conçus ou soutenus par le ministère des Armées. À cette occasion, l'Agence de l'innovation de défense (AID) a présenté des projets destinés à maintenir la supériorité opérationnelle des armées. Ils ont été classés en plusieurs catégories : technologie de défense, accélération de l'innovation, recherche et innovation participative. TECHNOLOGIE DE DÉFENSE Spinelle : matériau de blindage de pointe, transparent comme du verre, léger et ultrarésis-tant, pour équiper les véhicules terrestres et les hélicoptères à un prix abordable. Il est développé par la PME Solcera en collaboration avec Nexter et Airbus Helicopters. Le Forum innovation défense a réuni tous les acteurs ministériels et leurs partenaires externes autour de projets conçus ou soutenus par le ministère des Armées. Optifab : utilisation des technologies de fabrication additive pour la création de protections anti-explosion et de pièces de rechange à destination des véhicules blindés légers, notamment de leur plancher. En opération extérieure, elles permettront de produire directement des pièces provisoires en urgence et de gagner en opérationnalité. ACDC (SCAF/MMT) : débrui-tage d'un cockpit d'avion pour améliorer la reconnaissance vocale dans un aéronef et faciliter la commande par la voix. Ce projet est porté par le Laboratoire lorrain de recherche en informatique et ses applications (Loria-Inria), en partenariat avec Thales Avionics. ACCÉLÉRATION DE L'INNOVATION Helma-P : système d'arme laser capable de neutraliser un drone, ou à terme des roquettes, artilleries ou mortiers, ainsi que de protéger des convois et unités. Matep : augmentation des sens en communiquant par la peau. L'objectif de ce projet porté par la société Caylar est de développer un système tactile vibratoire permettant d'améliorer la communication entre deux hommes ou entre un homme et un animal, lorsque la vision, l'audition et le toucher actifs sont indisponibles ou dégradés (progression dans l'obscurité), perturbés (environnement sonore lourd), ou surchargés (particulièrement pour les pilotes d'aéronef). Rétine artificielle réactive (RAR) : technologie inspirée de la manière dont le couple œil/ cerveau acquiert et traite les informations du monde réel pour atteindre de nouveaux standards de performance en termes de rapidité, de consommation énergétique, de gamme dynamique et de volume de données généré. Un projet porté par la société Prophesee, en partenariat avec Safran Electronics and Defence et Thales Optronique. RECHERCHE Thèse de Geoffroy Klotz (diplômé de l'École centrale de Lille et ancien doctorant au CEA, en partenariat avec l'institut Fresnel de Marseille) : technique d'invisibilité destinée aux aéronefs. La conception de revêtements d'invisibilité permettrait de masquer les éléments de détection présents sur la surface des aéronefs, comme les antennes. Elocans : analyse des mouvements oculaires pour l'interaction humain/ système. L'objectif est d'étendre les fonctionnalités des casques des pilotes pour rendre possible l'interaction du pilote avec son système et de suivre son état psycho-physiologique à partir de l'activité électrique produite par les yeux. Un projet porté par l'Institut supérieur de l'aéronautique et de l'espace (ISAE-Supaéro), en partenariat avec l'École nationale de l'aviation civile (Enac) et l' École de l'air. Para-Fox : harnais ergonomique pour sauter en toute sécurité avec un chien. Le harnais amortit et absorbe les chocs subis par l'animal durant un saut en parachute. Un projet porté par le capitaine Jérôme du 132 e régiment d'infanterie cynotechnique, en liaison avec la société Paratec. INNOVATION PARTICIPATIVE WaKED-Co : facilitation et optimisation du travail de recherche bibliographique dans le cadre du Covid-19. La plateforme numérique WaKED-Co, basée sur l'intelligence artificielle et le Big Data, propose l'identifi-Et/ou cation, la sélection et la collecte automatique de l'ensemble des documents scientifiques produits dans le monde. Elle facilite le travail des chercheurs afin qu'ils puissent orienter leurs prises de décision. Une structuration en mode « projet » 200 projets de technologies de défense sont en cours et 218 projets de recherche ont été lancés dont 128 thèses de doctorat. Source : Armée de terre Projets de technologies de défense Préparer les technologies de défense de demain avec les projets de technologies de défense (PTD) qui portent à maturation les technologies nécessaires aux besoins militaires. 200 projets en cours Projets d'innovation participative Encourager l'innovation provenant du ministère grâce aux projets d'innovation participative (PIP) qui permettent à tout personnel, civil ou militaire, du ministère des Armées et de la Gendarmerie nationale de proposer un projet innovant. Projets d'accélération de l'innovation Accélérer l'innovation avec l'écosystème civil grâce aux projet d'accélération de l'innovation (PAI). Ils visent à capter l'innovation issue du marché civil afin de les déployer au plus tôt. 218 projets de recherche lancés dont 128 thèses de doctorat Projets de recherche Permettre de détecter et faire émerger les futures technologies stratégiques avec les projets de recherche (PR) auprès d'universités, d'organismes de recherche, d'écoles ou de certaines entreprises. Un projet porté par le Secrétariat général pour l'administration (SGA), notamment le Labo BI et Big Data de la Délégation à la transformation et à la performance ministérielles (DTPM) et le Service de santé des armées (SSA), avec une forte implication de l'Institut de recherche biomédicale des armées (Irba). EflyCo : projet de foils pour élever un bateau au-dessus de l'eau. L'objectif est de faciliter les 50 assauts MHz en mer par les forces spéciales et de minimiser les chocs entre l'embarcation et la surface de l'eau. Un projet porté s de fréquences de par la société SEAir, en partenariat avec le Fuscolab. DES PRODUITS POUR LUTTER CONTRE LE COVID-19 Un autre volet de ces journées a porté sur la lutte contre le Covid-19. Grâce aux capacités d'accélération d'innovation de l'AID, certains produits faisant suite à un appel à projets du ministère de la Défense sont à présent disponibles pour lutter contre la crise sanitaire. Outre WaKED-Co, le respirateur MakAir du collectif Makers for Life, de l'université et du CHU de Nantes, est entré en phase deux d'essai clinique. Citons également le projet Point of care de Loop Dee Science associé au Source : Fieec CHU de Rouen et à ELDIM, qui consistait à développer et valider un test de détection moléculaire SARS-CoV-2 chez l'humain par prélèvement naso-pharyngé. Le boitier développé permet de réaliser des tests, en dehors d'un laboratoire, avec un résultat en 30 minutes. Le produit est marqué CE et référencé sur la plateforme Covid-19 du ministère des Solidarités et de la Santé. Parmi les autres projets figure Covid-Box de l'institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, qui a permis de concevoir et d'équiper un laboratoire mobile autonome, prêt à Engageme l'emploi optionne et facilement transportable par voie routière, maritime et aérienne, en support des hôpitaux et systèmes de santé locaux, pour des tests moléculaires rapides et à haut débit. Il a notamment été utilisé à l'aéroport de Roissy. LE « SOLDAT AUGMENTÉ » : UN DÉBAT SUR LES QUESTIONS D'ÉTHIQUE Lors du Forum innovation défense, Florence Parly, ministre des Armées, s'est largement exprimée sur les enjeux d'éthique liés à l'innovation, et plus particulièrement sur la question du « soldat augmenté ». À cette occasion, le comité d'éthique de la défense, créé à la demande de la ministre des Armées à la fin de l'année 2019, a publié son avis sur le sujet après l'avoir présenté à la ministre le 18 septembre dernier. Le ministère des Armées travaille déjà sur plusieurs projets de « soldat augmenté », soldat dont les capacités physiques, perceptives et cognitives sont stimulées pour renforcer son efficacité opérationnelle. « Nous sommes aujourd'hui confrontés à des technologies de plus en plus «envahissantes» et performantes, qui permettent une exploitation des zones grises de tous les types, à un niveau inédit, dans les conflits auxquels nous sommes confrontés. Ces zones grises se situent par exemple entre combattants et non-combattants, entre action souterraine et action assumée, entre physique et numérique, conduisant à un «jeu» permanent sur les seuils d'acceptabilité. Et parmi ces seuils, le seuil éthique ne fait pas exception. Or ces nouvelles technologies, conjuguées à l'absence de règle caractéristique des zones grises, ne doivent en aucun cas laisser le champ libre aux dérives ou à la négation de nos valeurs », a déclaré Florence Parly. Dans ce contexte, la création du comité d'éthique de la défense répond à une question très simple : quel monde voulons-nous pour demain ? Cette question rejoint celle de l'homme augmenté. Toutefois, il y a des spécificités qui méritent de s'intéresser à ce soldat : augmenter les capacités perceptives ou physiologiques d'un homme n'a pas les mêmes conséquences pour un militaire en mission sur un théâtre de guerre. Quand on parle de soldat augmenté, on parle d'un soldat dont les capacités physiques, perceptives et cognitives sont stimulées pour renforcer son efficacité opérationnelle. En d'autres termes, le soldat augmenté existe depuis longtemps : il s'agit d'un militaire muni de jumelles de vision nocturne ou bien équipé d'un exosquelette. Mais aujourd'hui, ces augmentations deviennent de plus en plus sophistiquées et ne se limitent plus à l'équipement : désormais c'est la barrière corporelle de l'homme qui pourrait être franchie pour accroître ses capacités physiques, cognitives ou psychologiques. Et c'est à ce cas précis, ce qu'on appelle des augmentations « invasives », que le comité d'éthique s'est intéressé. Une start-up américaine fondée par un entrepreneur de la Silicon Valley très connu caresse le rêve d'augmenter les capacités cognitives de l'homme grâce à de minuscules électrodes implantées dans le cerveau. Certaines évolutions existent déjà, comme des opérations des yeux pour accroître l'acuité visuelle et s'affranchir de jumelles de jour ; d'autres sont en développement, par exemple des implants pour prendre le contrôle d'un système connecté. « Permettez-moi à ce stade de mettre fin à tout fantasme : ces évolutions dites «invasives» ne sont pas à l'agenda des armées françaises. Mais il faut être lucide, tout le monde n'a pas nos scrupules et c'est un futur auquel il faut nous préparer. L'avis rendu par le comité d'éthique nous y aide : en recherchant les voies et les moyens qui permettent de maintenir notre supériorité opérationnelle, sans nier nos valeurs et en respectant nos engagements internationaux. C'est un avis qui n'est pas gravé dans le marbre et qui sera régulièrement reconsidéré à l'aune des prochaines évolutions », a souligné la ministre. PLUSIEURS PROJETS D'AUGMENTATION « Nous ne disons pas non au soldat augmenté, mais nous en choisissons les modalités : nous rechercherons toujours des alternatives aux transformations invasives, c'est-à-dire des augmentations qui ne franchissent pas la barrière corporelle. Plutôt que d'implanter une puce sous la peau, nous chercherons à l'intégrer à un uniforme. En résumé, nous disons oui à l'armure d'Iron Man et non à l'augmentation et à la mutation génétique de Spiderman », ajoute-t-elle. Le ministère des Armées travaille déjà sur plusieurs projets de « soldat augmenté ». L'agence de l'innovation de défense a récemment sélectionné un projet de ceinture équipée de vibreurs pour permettre à deux soldats ou bien à un soldat et son chien de communiquer à distance lorsqu'ils progressent dans l'obscurité ou lorsqu'ils évoluent dans des environnements très bruyants. Il existe également des radars en phase de développement qui permettraient notamment à un soldat de détecter une présence à travers un mur.

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