Couverture ElectroniqueS n°127

DONALD TRUMP A FAIT DE LA GUERRE COMMERCIALE CONTRE LA CHINE L'UN DES AXES DE SA POLITIQUE VISANT À RENFORCER L'INDUSTRIE AMÉRICAINE. HUAWEI, ACCUSÉ D'ESPIONNAGE, FUT PARTICULIÈREMENT VISÉ. Durant le mandat de Donald Trump, les États-Unis n'ont cessé de faire pression sur les leaders de l'électronique américaine ainsi que sur leurs partenaires européens et taïwanais, pour qu'ils n'aient plus de relations commerciales avec les entreprises chinoises, accusant ces dernières d'espionnage. Une des illustrations récentes de cette guerre commerciale est la décision prise par les deux premiers fabricants sud-coréens de mémoires, Samsung Electronics et SK Hynix, d'arrêter de livrer Huawei en écrans, processeurs et mémoires, alors qu'ils avaient réalisé l'an dernier un chiffre d'affaires cumulé de 10 000 milliards de wons (7,3 milliards d'euros) auprès de l'équipementier chinois. LG a, lui aussi, décidé de ne plus livrer d'écrans à Huawei. Cela fait suite au renforcement des sanctions contre l'entreprise chinoise, décrété le 17 août par le département américain du Commerce, et qui met désormais en péril la fabrication de smartphones pour celle-ci. Les nouvelles sanctions américaines prévoient notamment d'interdire de vendre à Huawei des circuits électroniques et tous les sous-ensembles utilisant des technologies et des logiciels américains, sans autorisation préalable de l'administration américaine. Ce nouvel épisode de la guerre commerciale sino-américaine intervient peu après l'interdiction faite au taïwanais TSMC, premier fondeur mondial, de produire des puces pour Huawei. LA CHINE EST FORTEMENT IMPORTATRICE EN SEMICONDUCTEURS Mais cela n'impressionne pas la Chine qui fait feu de tout bois pour rattraper son retard en semi-conducteurs. Alors que le pays est le 2 e marché mondial de semi-conducteurs, les entreprises chinoises sont absentes du secteur en matière de production dans les technologies les plus avancées. À la fin 2019, la Chine importait 84 % de ses besoins en semi-conducteurs. Et seulement la moitié des 16 % produits localement étaient fabriqués par des sociétés chinoises. L'affaire Huawei encourage la Chine à accélérer le développement de son industrie nationale en la matière. Les sociétés nationales de semi-conducteurs et les développeurs de logiciels sont en partie exemptés de taxes. En même temps, Beijing recrute à grands frais des talents étrangers et investit dans de nouvelles usines. Elle structure aussi son industrie par des acquisitions d'acteurs locaux ou étrangers, sous l'égide du groupe public Tsinghua Unigroup. La Chine devrait d'ailleurs être numéro un en termes de dépenses d'équipements de fabrication de puces en 2020 et 2021, selon Semi. Le plus grand fondeur du pays, Smic, soutenu par l'État, a récemment augmenté ses dépenses en capital pour la deuxième fois cette année, à 6,7 milliards de dollars. Il a également annoncé qu'il construirait une usine en coentreprise d'une valeur de 7,6 milliards de dollars. La Chine a mis en place un fonds national pour les semi-conducteurs de 204,2 milliards de yuans (28,9 milliards de dollars), dans le but de renforcer son industrie de puces et de combler le fossé technologique avec les États-Unis. Ce fonds soutenu par le gouvernement est plus important de 9,2 milliards de dollars que le précédent lancé en 2014, qui avait permis de lever 139 milliards de yuans (19,7 milliards de dollars). Le plan Made in China 2025 vise, entre autres, à produire localement 70 % des besoins en semi-conducteurs chinois d'ici à 2025. Dans les semi-conducteurs, la Chine a cependant encore un long chemin à parcourir pour rejoindre les leaders mondiaux. Le précédent fonds a consacré des milliards de dollars à des dizaines de projets et Yangtze Memory Technologies, l'un d'eux, a annoncé en septembre dernier avoir commencé à produire en masse certains types de mémoires flash. Bien que la société rattrape rapidement son retard, elle reste à la traîne par rapport aux géants du secteur. D'autres efforts se heurtent à des barrages de la part des États-Unis. Ainsi, la production de Fujian Jinhua Integrated Circuit, un autre fabricant de mémoires, s'est arrêtée après que Washington ait interdit aux entreprises américaines de faire affaire avec lui en 2018. Mais la Chine est bien décidée à ne pas en rester là. Afin de viser une maîtrise des technolo-gies de semi-conducteurs et de réduire ainsi sa dépendance à l'égard des fournisseurs étrangers, une centaine d'ingénieurs et de managers ont récemment été débauchés chez le premier fondeur mondial, le taïwanais TSMC. Ils sont employés par Quanxin Integrated Circuit Manufacturing, et Wuhan Hongxin Semiconductor Manufacturing, peu connus en dehors de la Chine. Les deux entreprises visent à développer des technologies de pro-cess de puces de 14 nm et de 12 nm, qui ont deux à trois générations de retard sur TSMC, mais qui restent les plus avancées en Chine.

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