Couverture ElectroniqueS n°127

Ces deux terres raies sont utilisées pour la fabrication des aimants permanents dédiés notamment aux moteurs des voitures électriques et aux générateurs des éoliennes. Pour répondre à cette demande en hausse, de nouvelles capacités de production sont envisagées ainsi que le recyclage. Des substituts commencent aussi à être étudiés. L e marché des terres rares est dominé par la Chine qui est à la fois le premier pays producteur de ces matériaux (avec une production de 150000 tonnes d'oxydes de terres rares sur 170000 tonnes au niveau mondial en 2016, soit 88 % du total) et le premier consommateur (110000 t sur 160000, soit 64%). Cette dominance a eu des conséquences importantes quant à l'évolution des prix des terres rares dans le monde et, partant, sur la production des pays concurrents. C'est ainsi qu'en 2011, une révision à la baisse des quotas d'exportation de terres rares par la Chine a causé une augmentation brutale des prix de ces matériaux. Le prix du kilogramme de néodyme est, en particulier, passé de moins de 30 dollars en 2010 à 450 dollars à la mi-2011. Il est aujourd'hui inférieur à 50 dollars. Cette augmentation soudaine a contraint de grands pays utilisateurs, comme le Japon (16% de la demande mondiale de l'époque), les États-Unis (10%) et l'Europe, à se plaindre auprès de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Cette plainte a abouti à la suppression des quotas chinois et des taxes chinoises à l'exportation - remplacées alors par une imposition de la production. Cet épisode de hausse soudaine des prix suivie d'un retour progressif à la « normale » a eu des répercussions sur la production des concurrents de la Chine. Ainsi, dans un premier temps, pour contrer les quotas chinois, Molycorp a ré-ouvert la mine de Mountain Pass (Californie) en 2012, tablant sur les prix élevés des terres rares de 2011. Toutefois, le retour des prix au niveau de 2010, au cours de la période 2012-2016, a contraint ce minier à entrer en redressement judiciaire en juin 2015 puis à fermer définitivement cette activité. Ceci en raison des marges insuffisantes réalisées par celle-ci. En effet, dès 2012 les prix de quasiment toutes les terres rares ont retrouvé leur niveau d'avant 2011. Du fait d'une forte demande (utilisation dans la fabrication des aimants permanents), les prix du néodyme et du praséodyme ont mis plus de temps à redescendre. La Chine est à la fois le premier pays producteur d'oxydes de terres rares et le premier consommateur de ceux-ci. Sa part de la production mondiale est en baisse. Toutefois, elle multiplie tes partenariats et les investissements dans les projets hors de Chine. Le gros marché des aimants permanents Dans un deuxième temps, à partir de 2017, les prix du néodyme et du praséodyme ont ré-augmenté du fait d'annonces faisant état d'une forte demande à venir pour ces terres rares qui sont incluses dans les aimants permanents destinés au moteur de la voiture électrique et aux générateurs des éoliennes. Ainsi, le constructeur de voitures électriques Tesla a équipé son Model 3 - le véhicule électrique qui a été le plus vendu au monde en 2018 - de moteurs à aimants permanents utilisant un alliage NdFeB (alliage de néodyme, de fer et de bore). La masse moyenne de néodyme et praséodyme par voiture serait comprise entre 0,75 et 1,7kg. La même année, la Chine a annoncé qu'elle visait, en 2019,10% des ventes de voitures neuves dans le pays sous forme de véhicules électriques ou hybrides. Pékin prévoit 12% en 2020. Dans le même esprit, la France et la Grande-Bretagne ont annoncé l'interdiction de la voiture thermique sur leurs territoires respectifs à partir de 2040. Par ailleurs, au plan énergétique, nombre de pays neufs tablent sur les énergies renouvelables, notamment sur (Suite page 51 ) l'énergie en provenance des éoliennes. Or, beaucoup de générateurs d'éoliennes utilisent des aimants permanents à alliage NdFeB. Pour idée, un générateur de puissance 1MW peut inclure quelque 600kg d'aimants permanents. La consommation mondiale de néodyme et de praséodyme serait ainsi en forte croissance. Toutefois, les prix de ces deux terres rares ont un comportement erratique avec des hausses en fonction des annonces (Tesla, par exemple) et des baisses liées à des déstockages. Ainsi, le prix du néodyme a remonté fortement en 2017 puis est retombé à quelque 50 dollars le kilogramme, aujourd'hui. Le néodyme et le praséodyme sont de plus en plus recherchés. En effet, ces deux terres rares sont utilisées pour la fabrication des aimants permanents destinés aux moteurs des voitures électriques et aux générateurs des éoliennes Des stratégies de soutien de l'offre L'hégémonie chinoise en terres rares a aussi eu pour conséquence que certains pays utilisateurs - avec lesquels la Chine a des motifs de friction - ont cherché puis ont soutenu financièrement des alternatives aux miniers chinois. C'est notamment le cas du Japon qui, par le biais de l'organisme public Jogmec ( Japan Oil Gas ancl Metals National Corporation), a favorisé des partenariats entre industriels japonais et miniers présents hors de Chine. Au cours de la période de prix bas des terres rares (2012-2016), la compagnie minière australienne Lynas a notamment bénéficié d'un tel soutien financier. Et depuis que le marché est redevenu plus porteur, elle a pu envisager de doubler la capacité d'extraction de son site de Mount Weld (Australie). La détente du marché a aussi permis à d'anciens projets, gelés entre 2012 et 2016, de reprendre vie. C'est notamment le cas du projet de mine à Kvanefjeld (Groenland), placé sous la houlette de Greenland Minerais. Les réserves en terres rares y seraient abondantes et le classeraient à la deuxième place mondiale (capacité de production annuelle d'oxydes de terres rares évaluée à 23 000tonnes). Toutefois, dans ce cas, la Chine s'y est intéressée par le biais de Shenghe Resources Holding qui a signé un accord avec Greeland Minerais en août 2018. Et en début 2019, Shenghe Resources Holding et China National Nuclear Corporation ont créé une société conjointe ayant pour objectif d'importer en Chine, pour leur raffinage, les terres rares extraites de Kvanefjeld. De nouveaux acteurs se font jour. Ainsi, la compagnie minière Mkango Resources vient d'annoncer des ressources plus importantes que prévues initialement à Songwe Hill (Malawi). En outre, cette exploitation pourrait se faire à ciel ouvert. Dans la pratique, elle pourrait démarrer en 2020 ou en 2021. Le projet en question inclut un accord avec Metalsys pour la fabrication d'aimants permanents. En Afrique toujours, Rainbow Rare Earths a débuté, en 2017, l'extraction de minerais contenant des terres rares à Gakara, près du lac Tanganyika, au Burundi. Ces minerais ont une teneur exceptionnelle en oxydes de terres rares (55% contre de 1 à 5% habituellement). Cette mine pourrait produire 6000 tonnes d'oxydes de terres rares - dont la moitié de néodyme et de praséodyme-en 2019. Ce qui en ferait un acteur mondial de premier plan. D'autres gisements pourraient être exploités dans les années à venir : en Austra-lie (projets Browns Range, Dubbo, Nolans Bore et Yangibana), au Canada (projet Ashram) et en Tanzanie ( projet Ngualia). LES 17TERRES RARES ET LEURS UTILISATIONS -> Les 17 terres rares sont : le néodyme, le praséodyme, le dysprosium, le samarium, le terbium, l'europium, le gadolinium, le lanthane, l'yttrium, le cérium, l'erbium, le thulium, l'ytterbium, le lutécium, le scandium, le prométhium et l'olmium. ->Le néodyme, te praséodyme ainsi que le dysprosium sont utilisés dans la fabrication des aimants permanents. Du fait de l'vènement de la voiture électrique, ces terres rares sont de plus en plus utilisées ->Le samarium intervient aussi dans la fabrication des aimants permanents. ->Le lanthane prend place dans la production des accumulateurs nicKel-hydrure métallique. ->Le terbium et l'europium sont employés dans la fabrication des luminophores. Le début du recyclage La Tesla Model 3 - te véhicule électrique qui a été le plus vendu au monde en 2018 - utilise un moteur à aimants permanents à base d'alliage NdFeB (alliage de néodyme, de fer et de bore). Du fait de ses disputes territoriales avec la Chine et de la propension de ce dernier pays à jouer de l'arme limitation des exportations de terres rares en guise de mesure de rétorsion, le Japon a, tôt, mis sur pied une activité de recyclage en vue de la récupération des terres rares. La France n'est pas en reste. Dès 2011, elle a créé un comité pour les minéraux stratégiques (Cornes), et, en 2013, le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) a démarré, un projet, dit Extrade, pour la récupération, le traitement et la valorisation des aimants permanents à partir des déchets électriques et électroniques (DEEE). Sont notamment concernés les disques durs d'ordinateurs, les haut-parleurs des équipements audio et vidéo, et les moteurs électriques présents dans le petit électroménager et les appareils des Technologies de l'information et de la communication (TIC). Le recyclage en question repose sur un broyage des aimants récupérés, puis un traitement chimique. En outre, des études sont actuellement menées pour l'amélioration du recyclage : à partir des travaux du CNRS, la start-up Ajelis a conçu une méthode originale de récupérationséparation des terres rares. Enfin, des études portent sur le remplacement des terres rares. Ainsi, Toyota a modifié un moteur à aimant permanent de façon à ce qu'il utilise deux fois moins de néodyme que l'original. Ce moteur devrait être commercialisé l'an prochain.

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