Couverture ElectroniqueS n°127

Dans un livre dédié à la responsabilité sociale des entreprises (RSE), le Club Rodin donne la parole aux acteurs et plus particulièrement aux dirigeants de PME et de TPE, depuis les progressistes convaincus jusqu'aux rares détracteurs de la RSE. Il en conclut en synthèse que la RSE crée de la valeur pour l'entreprise. L e Club Rodin, « think tank » de la Fieec qui regroupe une douzaine d'experts et de chefs d'entreprise qui échangent régulièrement sur des sujets socio-économiques liés au secteur électrique et électronique, vient de présenter son livre consacré à la RSE (Responsabilité sociale des entreprises), écrit par Gérard Cappelli. Il met en avant l'importance de la RSE pour les PME et les TPE, qui leur permettra d'évoluer et de se développer. Selon le laboratoire d'idées de la Fieec, il s'agit même de « se réinventer ». Dans son ouvrage, le Club Rodin relate ses rencontres avec une série de dirigeants et accompagnateurs de PME et TPE, depuis les progressistes convaincus jusqu'aux rares détracteurs de la RSE. Il en conclut en synthèse que la RSE crée de la valeur à travers trois actions. Ancrée dans le projet d'entreprise, elle en élargit la vision à long terme. Intégrée à la stratégie, elle consolide l'organisation et le système de management. Déclinée en bonnes pratiques opérationnelles, elle catalyse la performance globale de l'entreprise. Fort de cette conviction, le Club Rodin s'adresse en ces termes aux entrepreneurs : « dirigeants de PME et TPE, si vous voulez mobiliser et fédérer vos équipes, co-construire durablement avec vos parties prenantes, et donc en un mot, réussir, lancez-vous en RSE ». Le livre intitulé « Réinventer nos PME. Le rôle essentiel de la RSE » donne la parole aux acteurs. Ils se sont exprimés à travers des questionnaires et l'on retrouve leurs citations dans ce livre qui énonce par ailleurs « les dix commandements de la RSE » ou plutôt les douze raisons de mener une démarche RSE à travers des exemples concrets. Dans son ouvrage, le Club Rodin met en avant l'importance de la RSE pour les PME et les TPE, qui leur permettra d'évoluer et de se développer. Selon le laboratoire d'idées de la Fieec, il s'agit même de «se réinventer». Lors de la présentation de l'ouvrage, Bernard Bismuth, président du Club Rodin et ancien dirigeant de la PME CCI Euro-lam, a souligné qu'il convient de « se poser les questions sur ce qu'il va se passer dans notre métier d'ici quelques années. enE t dées ter». Où en sera-t-on dans cinq ans et quelles seront nos activités, car dans le cadre d'un plan d'embauches, il faut commencer par avoir cette démarche ». « Par exemple, nous avions prévu que le circuit imprimé allait devenir flexible. À l'époque, ce marché n'était pas très important, mais aujourd'hui, il constitue la principale activité de l'entreprise ». Il faut se demander : « que dois-je faire pour que l'entreprise existe encore dans 10, 15 ou 20 ans après l'avoir quittée. Il faut avoir une vision et une stratégie, et une fois la stratégie lancée, partager la réflexion avec les clients », ajoute Bernard Bismuth. 90% d'humain, 10 % de numérique « La RSE, c'est une question qui ne se pose même pas pour les grands groupes. Il faut savoir présenter sa démarche et susciter l'étonnement chez nos clients. En tant que spécialiste de l'assemblage de cartes électroniques, nous sommes liés à tous les référentiels normatifs et nous devons savoir comment faire le lien entre tous les textes normatifs ISO. Ayant également une usine au Maroc, nous devons présenter les avan-tages, mais aussi les inconvénients, par exemple pour la production de petites séries de cartes en nous posant la question de l'impact carbone, et donc de la conséquence sur l'environnement pour une fabrication de dix pièces », souligne Jean-François Mahé, Pdg de Selha. En défendant le RSE, le Club Rodin a la conviction que la réussite d'une entreprise est liée aujourd'hui à 90 % d'humain et 10 % de numérique. L'industrie du futur ou l'intelligence artificielle peuvent déboucher sur le meilleur comme le pire. Notre monde qui arrive peut détruire, mais peut créer aussi de la valeur et du progrès. C'est une politique de progrès humain qui accélère le progrès scientifique et pas l'inverse. Il importe donc de prendre le virage correctement pour faire fructifier la chaîne de valeur de nos métiers et pour mieux faire coopérer toutes les ressources humaines qui composent les maillons de cette chaîne, car c'est d'eux dont dépend le progrès des entreprises et, à travers elles, le progrès humain et les conditions de vie des citoyens. Tout le personnel est totalement impliqué dans une démarche RSE. Donc, non seulement la RSE s'inscrit dans un projet d'entreprise et son orientation stratégique, mais elle est aussi un booster pour les équipes. C'est également une porte ouverte sur l'industrie du futur. Après de nombreuses années passées sans se préoccuper des gaspillages et de matières avec des conditions de travail parfois difficiles, et dans un contexte de relations superficielles avec les fournisseurs et même les clients, les entreprises conviennent maintenant que leur pérennité passe par la prise en compte de ces préoccupations. Complémentarité avec les systèmes de management La RSE se rattache aux systèmes de management. Leur complémentarité est d'ailleurs patente dans plus de la moitié des interviews. De nombreuses PME adhérentes aux syndicats de la Fieec sont a minima certifiées ISO 9001, et souvent dans d'autres systèmes (ISO 14001, OHSAS 18001 pour santé-sécurité) ou domaines spécifiques (par exemple, ISO 13485 pour les dispositifs médicaux, EN 9120 pour l'avionique et le militaire). De nombreux interviewés confirment l'intérêt de la reconnaissance de leur démarche RSE par un tiers indépendant, sur la base d'un référentiel d'évaluation. Certes, la RSE ne fait pas l'objet d'une certification. Elle n'est pas pour autant un papillonnement qui consisterait à aborder tel ou tel domaine au gré des opportunités ou des envies des dirigeants ou managers. Décider de mener une démarche RSE, c'est engager sa responsabilité d'entreprise. Dans l'acronyme RSE, c'est la lettre R qui soulève le plus de débats. R aussi comme reporting nécessaire ou, plus globalement, redevabilité. Être redevable à l'égard de la société et de l'environnement, c'est répondre à ses impacts. Si la réglementation RSE actuelle ne concerne pas les PME, des textes plus spécifiques impactent leurs activités: un projet européen sur les minéraux de conflit, un autre sur l'économie circulaire, une directive relative à l'écoconception des produits liés à l'énergie et d'autres directives sur l'efficacité énergétique, les substances chimiques, l'utilisation des substances dangereuses, l'étiquetage et l'information environnementale. Si la réglementation RSE actuelle ne concerne pas les PME, des textes plus spécifiques impactent leurs activités, notamment dans la filière électronique. Les fiches du guide professionnel de la Fieec mentionnent un éventail réglementaire s'appliquant aux produits électroniques : un projet européen sur les minéraux de conflit, un autre sur l'économie circulaire, une directive relative à l'écoconception des produits liés à l'énergie et d'autres sur l'efficacité énergétique, la directive DEEE (déchets d'équipements électriques et électroniques) et d'autres directives relatives à certains produits (notamment piles et accumulateurs), le règlement Reach sur les substances chimiques et la directive RoHS sur l'utilisation des substances dangereuses, la directive sur l'étiquetage et l'information environnementale. Malgré toutes ces incitations à s'engager en RSE, certains dirigeants de PME ne se sentent pas concernés par cette démarche ou la perçoivent comme une contrainte normative ou réglementaire. Plusieurs obstacles ont été cités dans le livre du Club Rodin par les chefs d'entreprises interrogés. Premier frein exprimé par les dirigeants : « pas le temps, pas une priorité ». Avec ses corollaires : « manque de b u d g e t », « manque de compétences » et « manque de culture partagée sur ce sujet ». Selon le Club Rodin, le principal obstacle à la RSE est plus en amont. Afin de le révéler, il a inversé le raisonnement: quel est le principal levier de la RSE dans les PME qui la pratiquent ? « La RSE s'inscrit dans une démarche personnelle stratégique du chef d'entreprise » et « elle permet de mobiliser les salariés autour d'un projet commun ». Donc si ce projet ou cette stratégie sont défaillants, a fortiori absents, cela devient un frein important à la mise en œuvre de la RSE dans l'entreprise. Selon le Club Rodin, les dirigeants de PME manquent trop souvent de vision, absorbés par leur quotidien et « le nez dans le guidon ». Or, res-ter « le nez dans le guidon », c'est fonctionner en permanence à court terme et donc ignorer le long terme. Dans la dernière partie de son ouvrage, le Club Rodin, convaincu par cette approche entrepreneuriale innovante, exprime à la fois sa compréhension de la RSE et le bénéfice que peut en retirer un dirigeant de PME. Le but est surtout de valoriser l'entreprise. Et bien sûr sont alors pris en compte les salariés, les clients, les fournisseurs, les banques et les partenaires. Il ne faut pas sous-estimer l'énergie à consacrer à cette démarche. Les études prennent du temps, convaincre le personnel prend du temps, la formalisation de la démarche prend du temps. Mais une démarche RSE n'est pas une démarche « pick and choose » qui consisterait à picorer dans le champ des domaines d'ac-tions au bon vouloir du dirigeant ou d'un manager. C'est une démarche structurée qui commence en général par un état des lieux : l'évaluation RSE. Celle-ci aboutit à un plan d'action qui fait progresser l'entreprise, y compris dans son organisation. De nombreuses entreprises d'électronique sont engagées dans une démarche RSE, ce qui témoigne de la grande vitalité du secteur. Au tournant des années 2000, l'électronique française aurait pu disparaître, emportée par le tourbillon de la crise de la téléphonie. Comment notre pays, acteur majeur dans la production des téléphones mobiles, a-t-il pu en quelques années disparaître du classement des fabricants ? Il faut rappeler qu'un monde nouveau a été imaginé pour l'entreprise dans les pays développés, un monde fabless. De nombreux responsables de grandes entreprises ont alors cédé, voire donné leurs sites à des groupes de sous-traitance étrangers. Ceux-ci ont rapidement délaissé le territoire national et le même phénomène s'est produit dans la plu-part des pays européens et aux États-Unis. Seule l'Allemagne, touchée elle aussi, y a relative-ment bien résisté. L'impact de ce phénomène a été catastrophique pour le réseau de PME sous-traitantes. À titre d'exemple, sur la centaine de fabricants de circuits imprimés de la fin des années 1990, à peine une vingtaine est encore existante. La contraction est de même niveau dans les autres branches du secteur électronique: composants actifs, passifs et industries associées. Face à ce champ de ruines, un certain nombre de chefs d'entreprise ont refusé la fatalité de la délocalisation et ont décidé de relever le défi, s'arc-boutant sur des valeurs qui leur ont per-mis de tenir. Des actions de filière ont été progressivement déployées au sein de la Fieec qui regroupe actuellement 87% de PME et ETI membres des syndicats de la profession. Elle s'est positionnée dès 2001 comme une force de propositions sur le concept de chaîne de valeur et elle a entrepris de faire valoir auprès des pouvoirs publics la forte contribution du secteur de l'électronique à l'in-dustrie en général. Ces messages ont été enfin entendus en 2008 par Hervé Novelli, chargé d'une mission gouvernementale qui s'est conclue par le rapport « La stratégie industrielle pour l'industrie du futur ». Le Club Rodin recommande aux dirigeants de PME d'être à l'écoute de leurs clients, mais aussi des salariés, des actionnaires, des partenaires, de la société civile et finalement, et de toutes les parties prenantes pertinentes ayant des relations avec leur entreprise. La sous-traitance électronique a su évoluer. De simples exécutants au service des «donneurs d'ordre », les entreprises du secteur ont su, d'une part, se positionner sur des produits de haute technologie et à forte valeur ajoutée, et d'autre part prendre en main leur chaîne d'approvisionnement. Par leur innovation en R&D, leur qualité de fabrication industrielle et leur niveau de service, les sous-traitants en électronique ont pu à nouveau se développer en doublant leur production depuis 2008 ! S'appropriant leur nouveau métier, ils sont redevenus les interlocuteurs de l'industrie. aussi es Pour conclure, le Club Rodin souligne que la RSE est un choix entrepreneurial volontaire. Tout dirigeant de PME est, classiquement, attentif aux attentes de ses clients et de ses actionnaires, et généralement à l'écoute de ses salariés. Anticiper serait donc le maître mot. C'est la recommandation du Club Rodin adressée aux dirigeants de PME, tous à l'écoute de leurs clients. Mais le conseil vaut aussi pour les salariés, les actionnaires, les partenaires, la société civile et finalement, toutes les parties prenantes pertinentes. En France et en Europe, les attentes des grands donneurs d'ordre sont plus que prégnantes depuis quelques années. Confrontée en permanence à la nécessité d'optimiser son organisation, la PME aura plus de facilité qu'une grosse structure à définir le fonctionnement adapté, « à se débrouiller pour que ça marche », à rester agile.

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