Couverture ElectroniqueS n°127

Qualcomm, Intel et les autres planchent déjà sur des circuits modems et des frontaux d'émission-réception RF compatibles avec la prochaine génération de téléphonie mobile. Objectif: lancer dès 2019 les premiers smartphones estampillés 5G-ready pour accompagner le début du déploiement des réseaux 5G. Le jeu de circuits utilisé actuellement par Qualcomm pour les tests 5G comprend le modem X50 (à gauche) et un module RF à antenne 28GHz (à droite). C 'est une première dans l'industrie selon Qualcomm. L'américain vient de tester avec succès son premier jeu de circuits 5G, avec une connexion dépassant la barre du gigabit par seconde en téléchargement. Annoncée lors du Qualcomm 4G/5G Summit en octobre dernier, cette démonstration est basée sur le circuit modem Snapdragon X50 et un circuit d'émission-réception 28GHz baptisé SDR051. L'ensemble utilise des bandes porteuses de 100 MHz. De quoi satisfaire les besoins toujours croissants de bande passante : on estime à environ 50 milliards de giga-octets le trafic mensuel de données mobiles en 2021 (cent fois plus qu'en 2011!), un trafic constitué à plus de 75% de vidéos. D'après Qualcomm, les premiers smartphones exploitant cette technologie 5G pourraient être commercialisés dès le premier semestre 2019 – pour l'instant, les utilisateurs devront se satisfaire des modèles compatibles avec la norme Gigabit LTE, déjà présente dans certains modèles haut de gamme récents (Samsung S8/S8+, HTC U11, LG V30, Moto Z² Force Edition, Asus Zenfon 4 Pro, Sony Xperia XZ Premium et XZ1, etc.), et qui assurera la transition entre 4G et 5G, a fortiori dans les zones où la couverture fournie par les opérateurs télécoms n'est pas la plus dense. La principale difficulté rencontrée par les concepteurs de jeux de circuits 5G comme Qualcomm réside dans la couverture des deux bandes de fréquences prévues, à savoir celle située en deçà des 6 GHz (5G NR sub-6 GHz) et celle située entre 24GHz et 100GHz (5G NR mmWave) et qui exploite notamment les bandes 24,25-27,5 GHz et 27,529,5 GHz. Transmettre à 28 GHz oblige à s'exposer à de nombreux challenges, en particulier les pertes entre station de base et combiné (jusqu'à 90dB sur 30 mètres), le blocage des ondes (main, corps, murs…) et la complexité (donc l'encombrement, le coût et la consommation d'énergie) de l'étage d'émis-sion-réception RF. Par exemple, une architecture à réseau d'antennes doit être déployée non seulement au niveau de la station de base (128 éléments au minimum), mais aussi dans le smartphone, qui embarquera typiquement 4 à 32 antennes (4 dans la plateforme de démonstration de Qualcomm). Et, pour des raisons physiques évidentes, les ondes à 28 GHz ont tendance à être bloquées, mais aussi à rebondir sur des objets plus petits que celles de moindre fréquence, d'où l'importance des antennes multidirectionnelles pour capter toutes les réflexions possibles des signaux utiles. < Intel devrait lancer à la mi-2019 ses premiers circuits modems multimodes compatibles à la fois avec la 5G et avec les réseaux existants, et destinés aux premiers smartphones et appareils «5G-ready». 5Gbit/s de débit descendant Le traitement numérique en bande 5 GHz est, lui, relativement plus simple à appréhender, comme le prouve le Snapdragon X50 qui assure la fonction modem à la fois pour les bandes sub-6 GHz et mmWave. Relativement, car il met tout de même en œuvre des techniques complexes : bandes pas-santes OFDM avec des largeurs allant jusqu'à 400 MHz et des intervalles aussi réduits que 0,125 ms, codage LDPC plus efficace que les actuels codes Turbo LTE pour les débits de données élevés, algo-rithmes de formation, de suivi et de commutation de faisceaux… Le X50 permet théoriquement des débits descendants pouvant atteindre 5Gbit/s (cinq fois plus que l'actuel modem Snapdragon X16 de Qualcomm), grâce notamment à l'agrégation de huit porteuses de 100MHz de large chacune, soit une largeur totale de 800MHz contre seulement 80 MHz (4 x 20 MHz) pour le X16. Leader incontesté d'un marché dont il détient environ les deux tiers, Qualcomm n'est toutefois pas le seul, sur ce secteur des circuits modems pour smartphones, à préparer l'avènement de la 5G. Intel continue par exemple de faire fructifier l'héritage d'Infineon en circuits pour smartphones et vient de mettre à jour sa feuille de route 5G. Dans la foulée de Qualcomm, l'américain planche sur les XMM 8000, une famille de modems 5G fonctionnant dans les bandes sub-6 GHz et mmWave, et qui visent tant les smartphones et ordinateurs que les boîtiers-décodeurs et passerelles d'accès – et même l'automobile. Prévu pour la mi-2019, le premier de ces circuits, baptisé XMM8060, constituera un circuit modem supportant à la fois la 5G NR et divers modes de transmission 2G, 3G et 4G. Intel tablant, comme beaucoup, sur un déploiement des réseaux 5G en 2020, ce circuit multimode aura pour cibles les smartphones et autres équipements estampillés «5G-ready ». Et nul doute que d'autres, notamment en Asie (Samsung, Mediatek, HiSilicon, Spreadtrum…), fourbissent actuellement leurs armes… Un déploiement très progressif Toutes ces expérimentations sont basées pour l'heure sur la norme Rel-15, la première qui soit estampillée 5G. Mais les fabricants de semi-conducteurs travaillent également sur les extensions prévues par la suite: déploiement de micro-stations de base, utilisation conjointe de réseaux 5G et de fréquences non règlementées, exploitation des bandes supérieures à 40 GHz, notamment dans l'intervalle 57GHz71 GHz… Autant de raffinements qui, eux, ne seront pas disponibles dès 2020. Le déploiement de la 5G « de base » nécessitera de toute façon du temps, car, à mesure que les fréquences de transmission augmentent pour faire passer des débits toujours plus imposants, la distance entre les stations de base diminue. La technologie 5G NR mmWave requiert ainsi des émetteurs-récepteurs distants d'au plus 150 à 200 mètres pour délivrer son plein potentiel, ce qui augure d'un déploiement coûteux et donc, dans un premier temps, très progressif et limité aux agglomérations les plus denses.

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