Couverture ElectroniqueS n°127

Du fait de l'interdépendance de nombreux paramètres, mesurer l'état de charge d'une batterie est un art en soi. Le comptage précis des coulombs, couplé avec des mesures de tension, d'intensité et de température, constitue la méthode la plus fiable. N ous sommes nombreux à pouvoir citer des dispositifs alimentés par batterie, dotés d'un indicateur précisant la quantité d'éner-gie ou la durée de fonctionnement dont dispose l'appareil concerné. Notamment parce que nous sommes entourés chez nous, depuis un certain temps, d'une mul-titude de gadgets. Depuis les rasoirs électriques jusqu'aux tablettes, nous disposons de toutes sortes d'indicateurs de charge pour nous aider à déterminer si nous sommes en mesure d'utiliser ces appareils et de quelle manière. Au fil du temps, nous avons acquis une certaine expérience quant au niveau de fiabilité de chaque appareil et nous savons quel crédit accorder à l'information indiquant, par exemple, qu'une batterie dispose encore de 10% d'énergie. Concernant les applica-tions exploitant des batteries d'accumula-teurs de plus grande puissance, la situation s'avère souvent plus critique si les utilisateurs se trouvent privés de l'énergie dont ils ont besoin. Nous citerons ici les vélos électriques, les systèmes d'alimentation de secours sur batterie, les outils électriques ou encore l'instrumentation médicale. Une batterie d'accumulateurs de secours n'est pas toujours disponible et il est parfois indispensable qu'un appareil puisse fonctionner pendant une durée donnée. Cette considération nous conduit à apprécier l'exactitude d'une jauge de batterie et à pouvoir évaluer à tout moment le niveau de charge d'une batterie ou d'un pack d'accumulateurs. CHRISTOPHER GOBOK (LINEAR TECHNOLOGY/ANALOG DEVICES) Christopher Gobok est ingénieur marketing senior pour les produits à signaux mixtes de Linear Technology, une société récemment acquise par Analog Devices. Il est diplômé (BSEE, MSE et MBA) de l'Université d'État de San José (Californie). Un indicateur de niveau de batterie est l'une des nombreuses fonctions dont est généralement pourvu un système intelligent utilisant une batterie d'accumulateurs, en sus des circuits gérant la charge, la protection et l'équilibrage des cellules. Indépendamment de leur fonction, les systèmes de batteries se caractérisent par un ensemble sans équivalent de problématiques de conception. En effet, il s'agit de dispositifs dont les caractéristiques électriques évoluent en permanence. Pour prendre un exemple, la capacité maximale d'une batterie (ou SOH, state-of-health ) et le taux d'autodécharge diminuent constam-ment au fil du temps, alors que les taux de charge et de décharge varient en fonction de la température. Les systèmes de batteries correctement conçus résolvent en continu autant de fluctuations paramétriques que possible pour apporter aux utilisateurs des critères fiables de perfor-mance, notamment concernant le temps de charge, l'estimation de l'énergie disponible ou la prévision de durée de vie d'une bat-terie (ou du nombre encore autorisé de cycles de charge). En résumé, un indicateur précis de niveau de batterie nécessite un circuit intégré tout aussi précis, assorti d'un modèle pertinent correspondant à cette batterie pour, finalement, permettre la mise en œuvre de systèmes capables de prendre en compte le paramètre le plus important, à savoir méthode de comptage des coulombs mise à profit par le LTC2944. Il faut garder à l'esprit que la charge est l'intégrale de l'intensité du courant par rapport au temps. Le LTC2944 mesure la charge avec une précision atteignant 99%, en surveillant la tension développée aux bornes d'une résistance de détection de courant, avec un intervalle de tensions de ±50mV. La tension différentielle est appliquée à un intégrateur analogique différentiel, avec mise à zéro automatique, pour en déduire la charge. Lorsque la rampe de sortie de l'intégrateur atteint les niveaux de référence haut et bas (REFHI et REFLO), les commutateurs basculent pour inverser la direction de la rampe. Les circuits de contrôle détectent alors l'état des commutateurs et le sens de la rampe pour déterminer la polarité. Ensuite, un pré-diviseur programmable donne la possibilité à l'utilisateur d'augmenter la durée d'intégration d'un facteur compris entre 1 et 4096. En cas de dépassement de capacité négatif ou positif du diviseur, le registre de charge accumulée (ACR, accumulated charge register) est finalement incrémenté ou décrémenté d'une unité. Il est important de noter que l'intégrateur analogique utilisé dans le compteur de coulombs du LTC2944 introduit une tension de décalage différentielle très faible avec, à la clé, un effet minime sur l'erreur totale de mesure de la charge. Nombre d'indicateurs de charge de batterie basés sur le comptage de coulombs effectuent une conversion analogique-numérique de la tension aux bornes de la résistance de détection de courant. Ils réalisent le cumul des résultats de la conversion pour en déduire la charge. Avec ce principe, la ten-sion d'offset différentielle constitue souvent la principale source d'erreur, en particulier lors de la lecture de signaux de faible amplitude. Prenons par exemple le cas d'un indicateur de charge de batterie utilisant un compteur de coulombs, associé à un convertisseur analogique-numérique affecté d'une tension d'offset différentielle maximale spécifiée de 20 µV. Si ce convertisseur effectuait l'intégration numérique d'un signal d'entrée de 1 mV, l'erreur sur la charge due à l'offset serait alors de 2%. Par comparaison, l'erreur sur la charge due à la tension d'offset avec l'intégrateur analogique du LTC2944 serait de 0,04 % seulement, soit 50 fois moins ! Retour aux fondamentaux: tension, intensité et température Si le rôle du comptage des coulombs est de consolider la mesure des tensions et de différencier les zones planes d'une courbe de charge ou de décharge, l'intensité et la température sont les paramètres qui serviront à choisir la courbe initiale la mieux adaptée. La difficulté réside dans l'impact significatif de l'intensité et de la température sur la tension aux bornes de la batterie (c'est-à-dire la tension appliquée à une charge). Les valeurs des tensions lues doivent donc être compensées par des termes correctifs proportionnels à l'intensité et à la tension en circuit ouvert (lorsque la batterie est déconnectée de la charge) par rapport à la température. Comme il est impossible de déconnecter une batterie de la charge en cours de fonctionnement, uniquement pour mesurer la tension en circuit ouvert, il est judicieux, au moins, d'ajuster la lecture de la tension aux bornes en fonction de profils de courant et de température. La haute précision de l'état de charge (SOC) constituant l'objectif ultime de la conception, le circuit LTC2944 utilise un convertisseur analogique-numérique delta-sigma de résolution 14 bits sans latence pour mesurer la tension, l'intensité et la température avec une précision garantie atteignant 1,3% et ±3°C, respectivement. En réalité, les performances nominales du LTC2944 sont nettement meilleures. Les graphiques de la figure 4 indiquent la variation de certains facteurs de mérite influant sur la précision du LTC2944 en fonction de la température et de la tension. La figure 4a montre que l'erreur totale non ajustée (TUE, total unadjusted error ) du convertisseur analogique-numérique lors de la mesure de tension est, en valeur nominale, inférieure à ±0,5 %. Elle reste pratiquement constante en fonction de la tension détectée. De manière similaire, la figure 4b indique que l'erreur de gain du convertisseur analogique-numérique lors de la mesure de l'intensité est, en valeur nominale, inférieure à ± 0,5 % en fonction de la température. Enfin, sur la figure 4c, on constate que l'erreur sur la température n'est que de ±1°C environ, quelle que soit la tension détectée. Tous ces facteurs relatifs à la précision se cumulent et peuvent facilement remettre en cause la précision de l'état de charge. D'où l'importance de prendre en compte la précision d'un indicateur de charge de batterie spécifique pour mesurer la tension, l'intensité et la température, parmi de nombreuses autres spécifications. Le LTC2944 offre quatre modes de conver-l'état de charge (SOC, state-of-charge) de la batterie. Ce taux indique la capacité instantanée de la batterie rapportée à sa capacité maximale. Il existe sur le marché des indicateurs de niveau de batterie intégrant des modèles et des algorithmes pour obtenir des estimations directes du SOC. Mais l'analyse détaillée de leur fonctionnement montre que ces dispositifs ont tendance à simplifier à outrance l'estimation de l'état de charge, au détriment de la précision. En outre, ces dispositifs ne fonctionnent généralement qu'avec des chimies d'accumulateurs particulières et nécessitent des composants externes pour assurer l'interface avec des tensions élevées. C'est ici qu'intervient le gestionnaire de charge pour batterie d'accumulateurs LTC2944 ( voir figure 1 ). Conçu pour les batteries jusqu'à 60 V, ce dernier fournit les éléments requis pour mesurer le niveau de charge d'un accumulateur ou d'une batterie comportant plusieurs éléments. Miser sur le comptage des coulombs Des études récentes ont montré qu'une estimation fiable du SOC suppose un comptage précis des coulombs, ainsi qu'une prise en compte de la tension, de l'intensité et de la température. Avec pour résultat, une erreur minimale de 5% sur la valeur obtenue. Ces paramètres nous per-mettent de cibler où se situe une batterie sur sa courbe de charge ou de décharge. Le comptage des coulombs permet non seulement de consolider la lecture des tensions lues, mais contribue aussi à différencier les zones planes d'une courbe. La figure 2 montre des courbes de décharge caractéristiques de batteries de différentes chimies. Le comptage des coulombs contribue à éviter, par exemple, une situation dans laquelle un dispositif indique un état de charge de 75% pendant une longue période, puis une chute soudaine à 15%. Ce scénario a tendance à se produire lorsque l'évaluation de l'état de charge repose exclusivement sur la mesure de la tension. Pour compter les coulombs, l'utilisateur initialise un compteur pour une capacité de batterie connue, à pleine charge, puis comptabilise les coulombs en moins pour une décharge et en plus pour une charge (afin de tenir compte des charges partielles). L'intérêt de ce principe est qu'il ne nécessite pas de connaître la chimie de la batterie. Le circuit LTC2944 intégrant un compteur de coulombs, il est facile de reproduire ce dispositif dans de multiples conceptions, indépendamment des propriétés chimiques de la batterie. La figure 3 nous aide à comprendre la sion analogique-numérique pour mesurer tensions, intensités et températures. En mode automatique, le circuit effectue des conversions en continu à l'aide du CAN, toutes les 2 ou 3 millisecondes. A contrario, en mode balayage, une conversion effectuée toutes les 10 secondes est suivie d'une mise en veille. En mode manuel, le circuit procède à une unique conversion à la demande, puis commute en mode veille. Dès qu'il est dans ce mode, le circuit abaisse son courant de repos à 80µA. Il est également possible d'arrêter l'ensemble de la section analogique du LTC2944 pour réduire encore le courant de repos jusqu'à 15 µA. Il est à noter que l'ultime fonction dont l'utilisateur a besoin est un indicateur de charge de batterie qui, paradoxalement, tire beaucoup d'énergie de la batterie. Éviter les modèles génériques intégrés L'utilisateur peut extraire du LTC2944 le niveau de charge, la tension, l'intensité et la température de la batterie à l'aide d'une interface I 2 C. Il est également possible d'accéder aux informations d'état, d'activer ou de désactiver la fonction et de définir les seuils haut et bas permettant de générer des alertes pour chaque paramètre. Il suffit alors de configurer un certain nombre de registres sur 16 bits via l'interface I 2 C. Le système d'alerte élimine la nécessité d'une scrutation continue par logiciel et libère le bus et l'hôte I 2 C, qui seront alors affectés à d'autres opérations. En outre, une broche ALCC sert à la fois de sortie d'alerte SMBus ou d'entrée indiquant la charge complète, celle-ci pouvant être raccordée à la sortie correspondante d'un circuit de charge de batterie. Au vu de toutes ces fonctionnalités, il serait logique de se poser la question suivante: « pourquoi les profils de batterie ou les algorithmes d'estimation de capacité/ d'état de charge n'ont-ils pas été intégrés dans le circuit lui-même?». La réponse est simple et n'est guère surprenante: tout est affaire de précision! Car s'il est vrai que des profils et des algorithmes intégrés simplifient la conception, il s'agit souvent de modèles inadéquats ou inappropriés par rapport au comportement réel d'une batterie. La précision relative au SOC s'en trouve sacrifiée. Par exemple, il est possible qu'un utilisateur soit amené à travailler avec des profils de charge et de décharge génériques, produits par des sources non spécifiées ou dans des intervalles de températures inconnus. De plus, les caractéristiques chimiques exactes de la batterie ne seront pas nécessairement compatibles, ce qui vient encore altérer la précision de mesure de l'état de charge. Il est essentiel de comprendre que la modélisation fiable d'une batterie nécessite généralement la prise en compte de plusieurs variables. L'opération est jugée suffisamment complexe par un utilisateur pour qu'il considère comme allant de soi de devoir modéliser sa batterie à l'aide d'un logiciel (pour optimiser la précision de l'état de charge), plutôt que de s'appuyer sur des modèles intégrés génériques et imprécis. Ces modèles intégrés contribuent au manque de flexibilité des jauges de batterie et à la difficulté de leur réutilisation. En d'autres termes, il est bien plus facile d'apporter des modifications à un logiciel qu'à du matériel, étant entendu que modifier le code d'une application s'avère plus simple que de changer de circuit. Dans ce dernier cas, une phase de configuration est de surcroît nécessaire. Et comme s'il n'était pas suffisant de proposer l'accès aux paramètres de mesure essentiels pour une batterie, avec une précision inégalée, au moyen d'une interface I 2 Cextrêmement pratique, les capacités de gestion des hautes tensions font du LTC2944 une solution d'indicateur de charge de batterie aujourd'hui sans équivalent sur le marché. Le LTC2944 peut en effet être directement alimenté en différentes tensions, depuis les batteries de 3,6V jusqu'aux modules de batteries d'accumulateurs de 60 V. Ce qui permet de couvrir un large spectre d'applications, allant de l'électronique portable basse consommation jusqu'aux véhicules électriques utilisant l'énergie de manière intensive. Nul besoin de compliquer la conception en ajoutant des circuits de décalage de niveau sur l'alimentation ou des broches de mesure. La connexion directe entre la batterie (ou les batteries d'accumulateurs) et le LTC2944 est possible et simplifie radicalement la conception du matériel. De plus, limiter le nombre de composants externes contribue à réduire la consommation d'énergie globale et à gagner en précision, notamment grâce à la disparition des diviseurs résistifs. n

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