Couverture ElectroniqueS n°127

Dans les alimentations destinées au secteur médical, le courant de fuite patient est un paramètre critique qu'il est impératif de réduire afin de répondre aux normes de sécurité en vigueur. Pour y parvenir, plusieurs approches sont possibles : ajout d'un convertisseur DC-DC, développement d'une alimentation spécifique ou modification d'un produit catalogue. D ans de nombreux pays, la conformité à la norme IEC 60601, relative aux équipements médicaux électriques et électroniques, est généralement demandée. Pour se protéger des chocs électriques, la dite norme définit des courants de fuite maximaux pour les équipements ayant des parties en contact avec le patient dans des conditions normales d'utilisation. Quatre types de contacts avec le patient sont ainsi définis. Le type B (body) se rapporte aux parties appliquées, normalement non conductrices, susceptibles d'être en contact avec le patient. Cela va des scanners à résonance magnétique (IRM) jusqu'aux lits d'hôpitaux et aux éclairages. Cette classification est la moins contraignante. Les types BF (body floating) et CF (cardiac floating) prennent en considération les éléments flottants par rapport à la terre. Pour le type BF, les éléments appliqués comprennent des parties conductrices qui sont en contact permanent, ou plus ou moins long, avec le patient. Sont notamment concernés les équipements à ultrasons et les moniteurs de pression sanguine. Pour le type CF, qui est le plus strict, les éléments peuvent être en contact direct avec le cœur, par exemple un dialyseur. Plusieurs types de courant de fuite sont également répertoriés, chacun ayant sa propre valeur limite définie par la norme : le courant de fuite à la terre, le courant de fuite de l'enveloppe, le courant de fuite patient et le courant auxiliaire patient. Le courant de fuite le plus problématique est le courant de fuite patient. Ce courant est celui qui s'écoule, via le patient, de la partie appliquée vers la terre. Il résulte de la présence d'une tension accidentelle générée par une source externe sur le patient. Dans la troisième édition de la norme, la limite a été fixée à 100 µA pour des parties appliquées de types B et BF et à 10µA pour une partie appliquée de type CF. Dans les alimentations, le courant de fuite patient est défini comme étant celui qui circule de la sortie vers la terre au travers d'une impédance de 1 kO (celle-ci repré-sente le patient). Ce courant de fuite est directement proportionnel à la valeur de la capacité entre l'entrée alternative et la sor-tie (capacité entrée/sortie). Cette capacité dépend à la fois de la capacité entre les enroulements du transformateur et des condensateurs Y de pontage entre primaire et secondaire. Si réduire la capacité entre l'entrée et la sortie s'avère souhaitable, il n'est néanmoins pas possible de s'en affranchir complètement dans la mesure où elle est demandée par la norme pour la sécurité du patient. En l'absence de condensateurs en parallèle, le courant de fuite patient transite essentiellement au travers du transformateur, un chemin ici matérialisé par des pointillés. DANTE DE GUZMAN (XP POWER) Dante De Guzman est directeur de l'ingénierie chez XP Power. Il est affecté à Sunnyvale en Californie. Ajouter un convertisseur DC-DC Considérons la capacité entrée/sortie d'une alimentation typique conçue pour le domaine médical. Sur la représentation simplifiée de la figure 1, en pointillés est mis en évidence le chemin de circulation du courant de fuite. La capacité entre le primaire et le secondaire du transformateur comprend la capacité C4 et la capacité entre les enroulements. Si C4 augmente, l'impédance présentée par le chemin du courant va décroître. Et si l'impédance diminue, davantage de courant va circuler vers le point G2. Ce courant constitue le courant de fuite patient. Il est à noter que C1 et C3 créent une autre voie pour le courant de fuite – celui-ci est le courant de fuite à la terre plutôt que le courant de fuite patient. La figure 2 est le modèle capacitif de la figure 1. Le courant de fuite patient (Ileakage) est égal à 2.p.f.C4.Vmains. Cette relation montre que le courant de fuite patient est directement proportionnel à la capacité entre l'entrée et la sortie. Il s'agit ici du modèle capacitif équivalent de la figure 1. Le courant de fuite patient est directement proportionnel à C4. Une méthode communément adoptée pour réduire la capacité de sortie et, par suite, le courant de fuite, consiste à ajouter un convertisseur DC-DC en sortie. Les techniques usuelles pour réduire le courant de fuite patient ont pour finalité de diminuer la capacité entrée/sortie de l'alimentation. Une méthode classique consiste à ajouter un convertisseur DC-DC entre l'alimentation et la partie appliquée. Ce qui se traduit par un niveau d'isolation supplémentaire (figure 3). Pour le système ainsi conçu, le chemin principal du courant passe maintenant au travers de C4 et C5, les capacités entre les enroulements des deux transformateurs. Le schéma équivalent est illustré figure 4. Un nouveau calcul nous donne un courant de fuite Ileakage2.p.f.Cs.Vmains (où Cs résulte de la mise en série de C4 et C5) fortement abaissé. A titre d'exemple, un travail récent effectué par XP Power sur une alimentation médicale a permis de faire chuter le courant de fuite patient de 11µA à 6µA, en ajoutant un conver-tisseur DC-DC comme décrit ci-dessus. Bien que cette méthode permette de réduire facilement la capacité de sortie, donc le courant de fuite, elle comporte des inconvénients. En effet, faire appel à un convertisseur DC-DC se traduit par un surcoût et une plus grande complexité de conception. Par ailleurs, le sous-système d'alimentation voit son empreinte accrue. Modifier un produit catalogue Une autre approche adoptée par XP entend, en concertation avec le client, s'affranchir d'un convertisseur DC-DC additionnel. Deux options sont possibles : soit réaliser une alimentation spécifique, soit modifier une alimentation médicale standard afin de réduire son courant de fuite. Cette seconde politique est la plus commune. Diminuer la capacité entrée/sortie pour obtenir un courant de fuite inférieur peut avoir des conséquences importantes sur les performances CEM de l'alimentation. Or celles-ci sont également critiques dans les applications médicales. En développant une alimentation spécifique, le but est de trouver un juste équilibre entre le courant de fuite et les performances en termes d'interférences électromagnétiques (IEM). On pourra par exemple l'obtenir en optimisant le blindage du transformateur. Une solution plus courante consiste àtrans-former une alimentation médicale catalogue pour répondre aux spécifications. En travaillant avec les clients sur des applications concrètes, XP Power a modifié avec succès des alimentations médicales standard pour tenir compte des nécessités des types BF/ CF des parties appliquées. Et ce avec des courants de fuite inférieurs à 10 µA, sachant que la conformité à la norme est aussi tributaire des courants de fuite du reste du système. Ainsi, un projet tirera le plus grand profit d'alimentations issues des séries GCS ou ECM60 de XP Power, qui répondent toutes à la norme à IEC60601-1. Les alimentations en topologie LLC de la série GCS sont modifiables pour répondre aux exigences CF dans un encombrement de 3x5”. Pour leur part, les alimentations de la série ECM60 sont créditées d'une empreinte de 2x4”. Leur plage de tension d'entrée est universelle (90 à 264 V) et, pour ce qui est des émissions électromagnétiques, elles satisfont aux exigences de la classe B. Pour toutes ces séries d'alimentations modifiées, des courants de fuite patient inférieurs à 10µA sont obtenus à partir d'une entrée de 264Vac/60Hz. Pour modifier une alimentation standard afin d'atténuer son courant de fuite, une méthode classique consiste à réduire la valeur des condensateurs Y. Cependant, la procédure n'est pas aussi simple pour toutes les alimentations. En laissant de côté les questions de CEM évoquées précédemment, même le retrait des capacités Y ne suffira pas toujours pour faire passer le courant de fuite patient sous la barre des 10 µA. En effet, la capacité entre les enroulements d'un transformateur est une propriété intrinsèque de ces derniers et ne peut dès lors être modifiée. Si elle n'est pas suffisamment basse, il ne sera pas possible de diminuer suffisamment la capacité de sortie pour satisfaire aux exigences demandées. Ce modèle équivalent de l'alimentation avec convertisseur DC-DC de la figure 3 montre que la capacité de sortie est réduite à un niveau acceptable. Mais d'autres composants interviennent. Ainsi en est-il des photocoupleurs qui font la jonction entre primaire et secondaire. Or ceux-ci sont aussi susceptibles d'ajouter une capacité parasite. Pour cette raison, les alimentations de XP Power font usage de composants affichant de faibles capacités. En résumé, les alimentations médicales doivent répondre à des normes de sécurité sévères. Le courant de fuite patient est souvent le paramètre le plus difficile à tenir. Il est directement proportionnel à la capacité entrée/sortie qu'il n'est pas toujours aisé de réduire pour des questions de CEM. Si un convertisseur DC-DC ajoute un niveau d'isolation, il a un impact sur le coût. La conception d'une alimentation spécifique est possible, mais cette option est peu souhaitée. La voie la plus économique, choisie par XP Power, consiste à travailler de concert avec ses clients afin de modifier une alimentation standard pour qu'elle réponde aux exigences les plus sévères en termes de courant de fuite patient. n

Résoudre les problèmes de courant de fuite dans les alimentations pour le médical

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