Couverture ElectroniqueS n°127

L'électronique irrigue tous les secteurs économiques. Les nouveaux acteurs, des entreprises, qui sont souvent des start-up qui découvrent l'électronique, ont le profil type du client de la distribution de composants. Un métier qu'Internet a révolutionné et qui a su s'adapter aux nouveaux défis que ses clients doivent relever. Quelle est la part de la distribution relativement au marché des composants électroniques en Europe et en France? Cette part peut-elle croître? PASCAL FERNANDEZ La distribution représente environ 25% du marché des composants en Europe et seulement 17% en France, selon Europartner (rapport 2014 établi à partir de données 2013). Il est intéressant de remarquer que la Grande-Bretagne et l'Italie sont proches des 40%, et qu'en Allemagne le ratio est de 25%. Le marché français des composants, qui demeure un des tout premiers en Europe, se cristallise en effet sur quelques grands comptes suivis en direct par les fabricants de composants. Quoi qu'il en soit, la part de la distribution ira croissant dans les années à venir. D'abord, parce que les distributeurs améliorent sans cesse la qualité et la compétitivité de leur service. Les grands comptes eux-mêmes n'affichent plus de réticence à être suivis par un distributeur. Ils y voient plutôt l'opportunité d'un support de proximité, d'une chaîne logistique plus rapide et plus flexible. Ensuite, parce que les fabricants de composants se concentrent sur leur cœur de métier et cherchent à sous-traiter les activités logistiques et de support. Enfin et surtout, parce que l'émergence sans précédent de nouveaux acteurs dans la filière électronique est en train de changer la donne. Ces PME et ces ETI utilisent les «électrotechnologies» comme un vecteur de différentiation –via la création de nouveaux produits, de nouveaux services ainsi que de nouveaux marchés. Et ces nouvelles entreprises sont autant d'opportunités pour les distributeurs de proposer leurs services techniques ou logistiques. PASCAL FERNANDEZ, président du SPDEI et Vice President Business Development Velocity d'Avnet Electronics Marketing “ L'émergencedenouveauxacteurs, qui utilisent les «électrotechnologies» comme un vecteur de différentiation, constitue une opportunité pour les distributeurs… En effet, les entreprises qui se lancent dans l'Internet des objets sont surtout des start-up dont beaucoup découvrent l'électronique. Elles ont donc le profil type du client de la distribution. Quel a été l'impact d'Internet au sein de la distribution de composants? PASCAL FERNANDEZ Internet a radicalement changé nos métiers à l'instar de toutes les activités de services quelle que soit l'industrie concernée. Alors que les distributeurs ont été pendant longtemps les porteurs et les diffuseurs de l'information technique et commerciale, maintenant, celle-ci est d'emblée disponible pour tous. Par ailleurs, l'économie globale dans laquelle nous vivons –qui a été elle-même transformée par Internet– est d'une très grande complexité et très volatile. Aussi, les entreprises ont-elles plus que jamais besoin de visibilité, de réactivité et de flexibilité. Ce qu'Internet et les applications «cloud» apportent et apporteront de plus en plus aux clients de la distribution en leur garantissant une visibilité totale de leur chaîne logistique ainsi qu'une réelle traçabilité totale, en leur fournissant une réponse aux exigences documentaires et en leur assurant, de ce fait, une meilleure maîtrise des risques. La connaissance en temps réel des stocks disponibles permettra une plus grande réactivité commerciale en même temps qu'elle supprimera des inventaires devenus superflus. En ce qui concerne le soutien au design, il s'appuiera de plus en plus sur l'aide en ligne, les forums et les informations proactives. Ce soutien s'inscrit dans un mouvement qui fait passer de la pensée «produit» à la pensée «solution». Les cataloguistes semblent particulièrement bien répondre à la demande de petites séries de composants, caractéristique du marché ouest-européen. D'ailleurs les grands noms de la distribution se sont mis à créer des départements spécialisés dans la livraison de petites quantités. Comment voyez-vous évoluer cette tendance? PASCAL FERNANDEZ Les solutions de vente en ligne, portées par nombre de nos adhérents, répondent particulièrement bien aux besoins pour la conception, la production de petites séries et la maintenance, toutes activités où la disponibilité des pièces et la variété du choix sont prépondérantes par rapport au prix des produits. De ce fait, en toute logique, si, pour un nouveau projet, le choix des composants et les premiers achats se font à partir d'un catalogue en ligne, il devient vital pour tous les fournisseurs de mettre en place une telle offre. Les fabricants de composants l'ont compris: tous ou presque ont intégré à leurs réseaux commerciaux des spécialistes de la vente en ligne. Toutefois, dès que les volumes commandés augmentent, ces spécialistes sont confrontés à la forte pression sur les prix qui caractérise le marché des composants. Ils ont choisi d'y répondre en mettant en avant la diversité de leurs offres et des conditionnements qu'ils proposent. En quoi l'émergence de nouveaux marchés (éclairage à Led, affichage et surtout M2M avec ses déclinaisons sectorielles–domotique, médical, remise en forme, santé…) va-t-elle changer quelque chose pour la distribution de composants électroniques? PASCAL FERNANDEZ Les distributeurs sont des partenaires très crédibles. Ils sont devenus des prescripteurs, des consultants ainsi que des fournisseurs de solutions. Dans notre profession, le niveau des équipes techniques s'est considérablement accru et nous avons acquis des compétences marché, et avons spécialisé des ingénieurs par application… Aussi, pour nous, l'émergence de nouveaux marchés signifie-t-elle avant tout de nouvelles opportunités de différentiation par la spécialisation. Les distributeurs mettent aujourd'hui l'accent sur la mise à disposition des clients de modules personnalisables dont l'utilisation permet de faciliter le design et de diminuer le time-to-market. Quelle est aujourd'hui l'importance des modules au sein de la distribution? PASCAL FERNANDEZ Ces solutions répondent à la nécessité, vitale, de réduction du time-to-market. Elles prendront de plus en plus de place lors des phases de conception, de prototypage et de fabrication de préséries ainsi que de petites séries. On peut penser que lorsque les volumes augmentent les solutions classiques continueront de s'imposer. Toutefois, dans les années à venir, le point de basculement entre les deux approches est appelé à évoluer en faveur des modules. Ce dilemme ressemble beaucoup à celui qui a opposé les Asic aux réseaux logiques programmables durant les décennies 1980 et 1990. Personnellement, je mise sur la flexibilité et la rapidité de mise en œuvre des solutions de type module. La distribution de composants livre essentiellement le monde de l'électronique professionnelle. Est-ce que l'émergence de l'Internet des objets va changer cette situation? PASCAL FERNANDEZ J'en suis convaincu! Les entreprises qui se lancent dans l'Internet des objets sont surtout des start-up dont beaucoup découvrent l'électronique. Elles ont donc le profil type du client de la distribution. Le véritable défi pour la filière électronique sera de créer les conditions favorisant le développement de ces jeunes entreprises et orientant leurs choix vers une production en France. C'est le sens du soutien de notre syndicat aux travaux de la Fieec, regroupés sous l'intitulé «Les industries électrotechnologiques au service de la société», et de notre engagement au sein de l'association APIE (Agir pour l'industrie électronique) aux côtés des fabricants de composants, des sous-traitants, des fournisseurs de l'industrie et des fabricants d'outils de test et de mesure. « Les solutions à base de modules répondent à la nécessité, vitale, de réduction du time-to-market. Elles prendront de plus en plus de place lors des phases de conception, de prototypage et de fabrication de préséries et de petites séries », estime M. Fernandez. Que vous a permis cet engagement au sein d'APIE? PASCAL FERNANDEZ De mieux défendre la cause de l'industrie électronique en France. Car cette défense suppose une entière collaboration de toutes les composantes de cette industrie… davantage même puisque l'écosystème dont il est question inclut la sphère publique. A cet égard, le rôle de la Fieec est central et APIE doit devenir le représentant de l'industrie électronique en France. Car notre pays n'est pas à court de talents et d'innovations comme en a témoigné la présence, remarquable et très remarquée, des entreprises françaises au dernier CES de La Vegas. Créer les conditions pour que ces start-up se développent et fabriquent en France est à la fois le grand défi que doit relever la filière électronique et la mission qui échoit aux organisations professionnelles rassemblées au sein d'APIE. Quels sont les autres travaux menés actuellement par le SPDEI? PASCAL FERNANDEZ Nous travaillons à améliorer la base de données statistiques utilisée par nos adhérents et collaborons, au sein d'APIE, à un projet d'observatoire de l'industrie électronique. Nous participons également aux travaux des groupes de recherches stratégiques de la Fieec ainsi qu'au think-tank le club Rodin. Nous avons lancé une newsletter, «SPDEI Connexion», et réactualisé notre site (www.spdei.fr). Enfin, nous avons démarré la préparation de la 20 e édition des «Trophées du SPDEI», qui se tiendra en décembre 2015, cet événement étant le grand rendez-vous annuel de la profession. Quels salons le SPDEI soutiendra-t-il en 2015 ? PASCAL FERNANDEZ Nous soutenons Enova, les salons industriels demeurant un moyen de prospection. Ceci dit, en France, la fréquentation des salons est si faible que nos adhérents les plus conséquents n'y voient que peu d'intérêt et préfèrent soit les salons de stature européenne, comme Electronica et Embedded world, soit des salons très spécialisés.

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