Couverture ElectroniqueS n°127

Avec la mondialisation la notion de marché géographique des composants perd de sa pertinence (voir notre numéro du 2 octobre dernier). En fait, quatre types de marchés sont désormais à prendre en compte. De plus en plus, la notion de marché des composants dépend du thème que l'on souhaite aborder. Tous les fabricants de composants sont capables par exemple de calculer les livraisons de composants par pays. Cette notion est importante lorsqu'il s'agit de traiter de problèmes de logistique ou même, éventuellement, de délocalisation de productions pour être au plus près des clients. Elle est importante aussi pour des statistiques qui révèlent par exemple que la Chine produit désormais 40 % de toute l'électronique mondiale et donc qu'elle emploie 40 % de la main-d'&oelig;uvre électronique mondiale. Mais elle ne révèle rien de plus qui soit vraiment utile à la vie des entreprises. La deuxième notion de marché, de loin la plus utilisée, est celle des facturations par pays. Là encore, tous les fournisseurs de composants savent faire la répartition géographique de leurs facturations. Les commandes sont en effet passées parfois par les usines où sont livrées les pièces mais elles peuvent aussi être passées par exemple par un siège “ régional ” à Singapour pour des livraisons en Chine. C'est la plupart du temps cette notion de lieu de facturation qui est retenue par les fournisseurs pour juger de l'importance régionale de leur client. Cette façon de raisonner est logique : c'est de là que vient l'argent. C'est d'ailleurs cette notion de facturation qui prévaut en France lorsque l'on aborde le marché du semiconducteur français. Mais de plus en plus de p-dg se rendent compte qu'une fabrication ou une facturation locale ne reflètent pas l'importance de la décision locale pour choisir des composants ou pour fixer le nombre de pièces à commander. Un exemple : le marché chinois des semiconducteurs pour les auto-radios est de 340 M $. Bien. Ce n'est pas négligeable. Mais qui importe ces semiconducteurs ? Panasonic, Pioneer, Sony, Kenwood, Siemens VDO, Clarion, Delphi, Visteon, Alpine, JVC, ainsi que trois Chinois, Toppower, Shenzhen Hongsheng, et Shenzhen Baoling (essentiellement pour le bas de gamme). Tous les étrangers cités exportent largement plus de 60 % de leur production locale. S'il faut dégager des ressources pour mieux vendre ce type de semiconducteurs, mieux vaut donc les placer au Japon, aux Etats-Unis et en Allemagne, là où se trouvent à la fois les centres de conception et les acheteurs qui décident des quantités de pièces à acquérir et même parfois du distributeur auquel l'usine locale devra s'adresser pour compléter les livraisons principales. Beaucoup de statistiques sont trompeuses Autre exemple : dans les statistiques, presque toutes basées sur les facturations, la Grande-Bretagne entre encore pour plus de 20 % sur le marché européen du semiconducteur. Mais qui commande ? HP, IBM, Sony, Matsushita, Siemens, Dell… Pourtant, aucune imprimante HP n'est conçue en Grande-Bretagne. Lorsque Dell choisit ses écrans LCD, il le fait bien entendu aux Etats-Unis. et les quantités à livrer en Grande-Bretagne sont déterminées par des ventes européennes de produits finis associées à des décisions étrangères de fabriquer ici ou là. Une marge de man&oelig;uvre en matière de choix et de commande de composants n'existe donc vraiment en Grande-Bretagne que chez les locaux tels Marconi et BAE Systems… qui ne représentent que de l'ordre de 10 % du marché britannique facturé. Bien entendu, il existe tout de même des ingénieurs et des acheteurs qui travaillent outre-Manche chez les étrangers. Mais leur vrai pouvoir de décision est très difficile à évaluer. C'est la raison pour laquelle il n'est pas encore possible de bien définir et calculer ce troisième type de marché, celui de la décision susceptible de remplacer le marché de la facturation. Pour contourner ce problème, certains grands du semiconducteur (dont Motorola et peut-être bientôt TI) ont pris la décision de juger leurs marchés grâce à des chiffres d'affaires head-quarter. Tous les achats d'Alcatel dans le monde sont ainsi comptabilisés pour la France. Ce n'est pas non plus objectif car beaucoup de produits Alcatel ne sont pas conçus en France ; mais cette approche est tout de même plus proche de la notion de pouvoir de décision que la facturation par pays. Cette quatrième façon de définir les marchés devrait donc rencontrer de plus en plus de succès.

La notion de marché des composants prend désormais quatre formes

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