Couverture ElectroniqueS n°127

Dans tous les secteurs de l'industrie, des pénalités s'appliquent normalement aux débiteurs en cas de retard de paiement. Si des factures ne sont pas réglées, le contrevenant s'expose à de lourdes sanctions de la part de l'administration. Mais les créanciers ne sont pas non plus à l'abri… Une directive européenne sur les délais de paiement adoptée en 2000, qui a été transposée en droit français en 2002 dans le cadre de la loi NRE (nouvelles régulations économiques), impose des pénalités en cas de retard de paiement des factures, sans que le créancier n'ait, en théorie, rien à réclamer. En théorie seulement, car la réalité est tout autre : de nombreux débiteurs ne tiennent pas compte de la loi, ce qui oblige les créanciers à les mettre en demeure.Normalement, des pénalités s'appliquent au-delà d'une date fixée par contrat, ou si celle-ci n'est pas fixée, 30 jours après la date de facturation des produits ou des prestations de services. Dans le domaine de l'électronique, le délai de paiement contractuel est, en réalité, de l'ordre de 60 jours pour les relations commerciales entre sociétés et de 45 jours dans le cadre des marchés publics. La directive prévoit une liberté contractuelle, mais introduit également une notion de paiement abusif, difficile à appréhender. Dans le secteur de l'électronique, un paiement a été longtemps considéré comme abusif à partir de 90 jours, mais des initiatives sectorielles tendent à ramener désormais cette notion d'abus à 65 jours. Par ailleurs, toutes professions confondues, l'administration estime qu'un délai de paiement est abusif lorsqu'il atteint 120 jours. Cette notion est donc sujette à interprétation et ne peut être strictement appréciée qu'en cas de recours devant les tribunaux.Les pénalités de retard dues par les débiteurs au-delà du délai contractuel correspondent au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne (BCE) majoré de 7 points, soit à un taux annuel d'environ 10 % actuellement. Depuis le début de l'année, la DGCCRF (Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes) a entamé ses premiers contrôles et a dressé ses premiers procès-verbaux à l'encontre de mauvais payeurs, qui risquent, selon les textes de loi, jusqu'à 15 000 euros d'amende pour une personne physique, et jusqu'à 75 000 euros pour une société. En pratique, les plaignants, dont l'anonymat est préservé, alertent leurs organisations professionnelles de pratiques abusives. Ces dernières saisissent ensuite la Commission d'examen des pratiques commerciales, qui en réfère à la DGCCRF. La grande distribution, qui en prendrait souvent à son aise avec les délais de paiement, serait particulièrement visée par ces contrôles. Toutefois, il est important de préciser que la Commission d'examen des pratiques commerciales ne règle pas des litiges individuels, mais qu'elle peut être saisie pour donner des avis concernant une catégorie professionnelle déterminée. Il ne s'agit en aucun cas d'un système de dénonciation des mauvais payeurs !Des contrôles fiscaux visent les fournisseurs« Bien que répondant à une attente longtemps exprimée par les créanciers, cette loi n'en est pas moins contraignante pour les fournisseurs », souligne Eric Jourde, directeur des affaires juridiques de la Fieec (Fédération des industries électriques, électroniques et de communication). De bonnes relations commerciales supposent en effet, bien souvent, que le fournisseur s'abstienne de demander des intérêts de retard à son client. Or, s'il ne le fait pas et que son client ne lui paie pas de pénalités de retard, l'administration fiscale comptabilisera, malgré tout, le montant dû dans le bénéfice imposable de l'entreprise qui a fourni les marchandises ou les prestations. Elle pourrait alors appliquer, à partir de 2005, un redressement fiscal sur des sommes qui n'ont pas été perçues, ce qui risquerait fort d'être ressenti comme une injustice, voire une aberration, par les entrepreneurs touchés.Le fait que le débiteur soit responsable ne dispense donc pas le créancier de devoir mettre en place un système sophistiqué de suivi des pénalités de retard. L'administration fiscale n'admettant l'abandon des pénalités que dans la mesure où des intérêts commerciaux le justifient, il paraît prudent de conforter cet abandon par un courrier adressé au débiteur, précisant que, dans un but commercial et en raison de nouvelles commandes en cours, les pénalités dues sur les précédentes factures ne seront pas recouvrées.

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