Couverture ElectroniqueS n°127

A quelques mois des arbitrages qui devront être rendus sur le budget européen de la recherche, un rapport réalisé à la demande de la Commission estime les besoins de la microélectronique à six milliards d'euros par an. Deux milliards d'euros pour la recherche amont et quatre milliards d'euros pour la R&D industrielle, tels sont les montants annuels du soutien financier que l'Europe pourrait accorder à la microélectronique, suite aux recommandations d'un rapport diffusé par la Commission européenne fin juin. Cela permettrait de doubler le montant actuel de 3 milliards d'euros, montant qui vient à la fois du PCRD (programme de R&D de la Commission), d'Eureka (autre programme de R&D européen, mais financé directement par les Etats) ainsi que des initiatives nationales d'aide à la microélectronique.A la suite de la publication de ce rapport réalisé par des représentants de l'industrie et d'organismes de recherche publics(*), un groupe de travail, baptisé Eniac (European Nanoelectronics Initiative Advisory Council), a été constitué. Présidé par Pasquale Pistorio, président et CEO de STMicroelectronics, sa mission est d'établir un ordre du jour de recherche stratégique concernant la nanoélectronique et de le mettre en &oelig;uvre. Il devrait tenir sa première réunion d'ici quelques jours.« La nanoélectronique constitue pour l'Europe un secteur stratégique offrant des possibilités de créer un nombre important d'emplois hautement qualifiés et de dynamiser la croissance et la compétitivité dans la plupart des autres secteurs industriels », avait déclaré Erkki Liikanen, qui était encore en juin commissaire en charge des entreprises et de la société de l'information.3 commissaires pour la recherche, les entreprises et la société de l'informationMais, depuis le 12 août dernier, les membres de la Commission européenne ont été renouvelés en totalité, et ce dernier n'en fait plus partie, pas plus d'ailleurs que Philippe Busquin, également à l'origine de la création de l'Eniac, qui a, quant a lui, achevé son mandat de commissaire en charge de la recherche. Compte tenu de l'élargissement, les questions qui relevaient d'Erkki Liikanen sont maintenant prises en charge par deux nouveaux membres de la Commission, l'Allemand Günter Verheugen, chargé des entreprises et de l'industrie, et la Luxembourgeoise Viviane Reding, responsable de la société de l'information et des médias. Quant à Philippe Busquin, il a été remplacé par un Slovène, Janez Potocnik, en tant que commissaire en charge de la recherche.Ce remaniement au sommet de la Commission sera-t-il bénéfique à la prise en compte du concept de politique industrielle en Europe ? La microélectronique a-t-elle réellement des chances de voir son soutien financier annuel doubler au cours des prochaines années ? Selon un observateur de l'industrie, « la nouvelle Commission est essentiellement composée d'anciens responsables politiques au service de l'Europe élargie, et comprend beaucoup moins de spécialistes qu'auparavant. Ils sont assez loin du terrain et des préoccupations réelles des industriels. De plus, avec trois commissaires au lieu de deux pour les questions relevant des entreprises, de la société de l'information et de la recherche, la coordination entre ces trois domaines sera plus difficile. L'industrie européenne avait pour sa part appelé de ses v&oelig;ux la création d'un poste de “ super-commissaire ” à la compétitivité et aux entreprises, et son souhait n'a malheureusement pas été exaucé », regrette cet observateur.Toujours est-il que des arbitrages budgétaires liés à ce soutien financier devront être faits dans le courant de l'année prochaine. Philippe Busquin avait soutenu l'idée d'un doublement du budget européen de R&D à l'occasion du 7e PCRD, c'est-à-dire pour la période 2006-2010, et tous les secteurs jugés stratégiques par l'Europe tels que la microélectronique, l'aéronautique ou l'automobile lui ont, par la suite, emboîté le pas en faisant, à leur niveau, la même revendication. Les industriels restent malgré tout optimistes, car plusieurs “ grands ” pays européens, tels que la France et l'Allemagne, insistent pour qu'un soutien accru en faveur de la recherche soit décidé. « Je souhaite vraiment que la recherche devienne une des premières, si ce n'est pas la première politique européenne. Je crois que nous pouvons gagner cette bataille », a déclaré en juillet le Premier ministre français, Jean-Pierre Raffarin, lors du déjeuner annuel de l'ANRT (Association nationale de la recherche technique).Reste que les équations seront difficiles à résoudre : d'une part, il n'est pas question de toucher au budget global de l'Union européenne, alors que le nombre de ses membres est passé de 15 à 25 ; d'autre part, le budget dévolu à la politique agricole commune (PAC), qui représente 50 % du budget total, reste une forteresse quasi imprenable. Philippe Busquin avait notamment semé le trouble parmi les partisans de la PAC en expliquant qu'il suffisait de réduire le budget de cette dernière de 2 % pour doubler celui de la recherche.(*) Ce document de 40 pages sur la nanoélectronique à l'horizon 2020 est téléchargeable sur la page Internet suivante : http://europa.eu.int/comm/research/industrial_technologies/articles/article_1190_en.html.

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