Couverture ElectroniqueS n°127

La concurrence se durcit pour faire battre le cœur de tous les appareils électroniques situés entre le téléphone et le PC portable, avec le lancement par Marvell de toute une gamme de processeurs embarqués compatibles ARM. Intel, Qualcomm, Texas Instruments, Freescale, Samsung, Renesas, ST, etc. La liste est déjà longue des fabricants de processeurs qui veulent s’emparer des nouveaux débouchés créés par les appareils nomades situés entre le simple radiotéléphone et le PC portable classique à plate-forme Wintel. L’heure est à la prise de “ design wins ” et de parts de marché dans des secteurs (livres électroniques, smartphones, terminaux d’accès Internet, baladeurs multimédias…) qui ne sont pas encore verrouillés par une architecture dominante et dont les volumes ne justifient pas toujours la conception d’un circuit spécifique. La compétition se durcit encore un peu plus avec l’arrivée de Marvell, qui lance, sous la belliqueuse appellation d’Armada, une famille complète de processeurs embarqués à cœurs ARM couvrant un large spectre d’applications. Une stratégie qui fait sens pour l’Américain, qui livre déjà chaque année plus d’un milliard de circuits dont les deux tiers embarquent un cœur à jeu d’instructions ARM, ce qui en fait peut-être le plus grand fabricant de circuits ARM du monde. Qui plus est, Marvell ne dispose pas d’une simple licence sur les processeurs ARM, comme TI ou Samsung, mais d’une licence sur l’architecture qui lui permet de concevoir ses propres processeurs compatibles avec les jeux d’instructions du Britannique. Enfin, son héritage s’avère conséquent en la matière, puisque c’est Marvell qui avait mis la main sur l’activité XScale (feu StrongArm) d’Intel, à l’époque où le géant de Santa Clara choisissait de se rabattre sur la bonne vieille architecture x86. En outre, Marvell dispose des briques de base nécessaires pour agrémenter ces cœurs Risc d’interfaces rapides et de fonctions graphiques désormais indispensables. Un concurrent sérieux donc, sur un marché dont on ne saurait encore dire s’il va se rationaliser autour d’une poignée de plates-formes (à l’instar des PC et des téléphones portables) ou demeurer éparpillé entre une multitude d’options technologiques. Gageons que la première option semble la plus probable à long terme. Un process Cmos 55 nm Dans le détail, les processeurs (ou plutôt systèmes sur une puce) Armada se répartissent en quatre familles dis-tinctes. Les Armada 100 visent les systèmes d’entrée de gamme n’offrant pas de graphismes en trois dimensions (cadres numériques, imprimantes multifonctions, systèmes de navigation, caméras de surveillance, téléphones VoIP, etc.). Ils embarquent pour cela un cœur maison de la gamme Sheeva PJ1 cadencé jusqu’à 1,2 GHz, un contrôleur d’écran WUXGA, un bloc d’accélération graphique 2D et un lot d’interfaces orientées grand public (PCIe, Ethernet, USB 2.0, cartes mémoire). Pour les ap-plications plus haut de gamme (boîtiers-décodeurs, lecteurs Blu-ray, téléviseurs), on se tournera vers les Armada 1000 rythmés par deux cœurs Sheeva PJ1 et agrémentés de blocs de décodage vidéo haute définition, de DSP audio hautes performances et d’un accélérateur graphique évolué. Les Armada 500 et 600 s’articulent, eux, autour d’un cœur Sheeva PJ4, compatible avec le jeu d’instructions ARM v7, là où le PJ1 s’en tient au jeu d’instructions v5. Visant notamment les livres électroniques, les Armada 500 bénéficient de raffinements graphiques (décodage 1 080 p, moteur graphique 3D gérant 15 millions de triangles par seconde, support pour écran WUXGA) qui font défaut aux Armada 600 davantage orientés vers les appareils nomades à résolutions d’écran plus faibles (smartphones, baladeurs multimédias). Pour donner un ordre d’idée, le cœur Sheeva PJ4 serait à rapprocher du Cortex A8, avec un pipeline moins étoffé, mais des fréquences de fonctionnement plus élevées ; le Sheeva PJ1, lui, jouerait plutôt dans la cour de l’ARM11. Selon les modèles, les processeurs bénéficient d’accélérateurs MMX2 et/ou VFP (Vector Floating Point), de 64 à 512 Ko de cache de niveau deux, de contrôleurs DDR, DDR2 ou DDR3 et de fonctions de cryptage/décryptage de données. Ils seront tous fabriqués en technologie Cmos 55 nm par TSMC, avec des process classiques ou faible consommation. Les livres électroniques figurent parmi les applications désignées des processeurs Armada. Marvell en bref Marvell a été fondé en 1995 à Santa Clara (Californie) et emploie plus de 5 000 salariés aujourd’hui. Il fournit désormais plus d’un milliard de circuits par an. D’abord spécialisé dans les circuits de lecture pour disques durs, il attaque le marché des circuits réseaux Ethernet en 1999. Coté en Bourse dès 2000, Marvell rachète dans la foulée son compatriote Galileo Technology lors d’une transaction valorisée à 2,7 milliards de dollars, ce qui étend considérablement son offre en circuits réseaux. La société conçoit de plus en plus de systèmes sur une puce, en s’appuyant notamment sur des licences ARM et Mips et sur le rachat du fournisseur logiciel Radlan en 2003. Elle se lance dans les circuits Wi-Fi tout en se renforçant sur ses marchés historiques (rachat des circuits pour disques durs de QLogic, des solutions réseaux de UTStarcom en 2005 et, surtout, des processeurs de communication XScale d’Intel en 2006 pour 600 M$). L’Américain a réalisé un chiffre d’affaires de 640,6 M$ lors de son dernier trimestre fiscal.

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