Couverture ElectroniqueS n°127

Sur les 35 milliards d’euros de l’emprunt national, 16 milliards d’euros reviendront à l’enseignement supérieur et à la recherche, et 4 milliards d’euros à l’économie numérique. Investir pour l’avenir, priorités stratégiques et emprunt national ”, tel est le titre explicite que la commission sur le grand emprunt, coprésidée par Alain Juppé et Michel Rocard, a donné à son rapport, remis le 19 novembre au président de la République. Même si ce dernier doit arbitrer en dernier recours, dans les tout prochains jours, les priorités nationales stratégiques et les financements alloués à chacune d’elles, le rapport de la commission (*), trace d’ores et déjà les grandes orientations que la France s’assignera en matière de politique industrielle au cours des prochaines années. La commission a identifié sept grandes priorités stratégiques visant à assurer la transition vers un nouveau modèle de développement. L’électronique y figure en bonne place, tant en amont (au niveau de la R&D) qu’en aval, avec par exemple le déploiement d’infrastructures de fibre optique. Un effort global estimé à 60 milliards d’euros Le montant global du grand emprunt est désormais officiel et a été validé par la présidence de la République. « Les besoins identifiés au titre de ces priorités correspondent à un investissement public de 35 milliards d’euros, et selon la commission, à un investissement total de 60 milliards d’euros par effet de levier vis-à-vis des financements privés, locaux et européens », confirme le site Internet de l’Elysée. « Le président de la République a partagé le constat de la commission qu’un effort exceptionnel d’investissement s’impose pour construire un modèle de développement plus durable fondé sur l’économie de la connaissance et l’économie verte », poursuit ce même communiqué. Pour être effectivement levés, les 35 milliards d’euros de l’emprunt proprement dit devront donc être abondés par un apport conséquent des industriels, et par des financements des collectivités locales et de l’Union européenne, à hauteur de 25 milliards d’euros. De nombreuses actions proposées, par exemple pour le développement du très haut débit, la constitution de campus d’innovation d’envergure mondiale ou le soutien à des technologies de rupture dans l’aéronautique et le spatial, doivent servir de catalyseur à des investissements importants, largement assurés par le secteur privé, souligne le rapport. Loin devant toutes les autres sur le plan des fonds alloués, la première des priorités identifiée par le commission est l’enseignement supérieur et la recherche. Elle recommande de lui consacrer 16 milliards d’euros, soit quasiment la moitié de l’emprunt. Sur ces 16 milliards d’euros, 13,5 seraient attribués au développement des campus universitaires et deux à la recherche. 10 milliards d’euros reviendraient à une “ Agence nationale des campus ” qui serait chargée de faire émerger « des campus capables de concurrencer les meilleurs mondiaux ». 3,5 milliards d’euros iraient au « développement de quatre à six campus d’innovation technologique » et 2 milliards d’euros à des initiatives pédagogiques innovantes et à des bourses « visant à attirer ou faire revenir en France des chercheurs de haut niveau ». La commission propose par ailleurs de s’inspirer des meilleures pratiques mondiales pour constituer autour de cinq “ campus d’innovation technologique ”, des établissements de formation, des laboratoires de recherche appliquée publics et privés et des acteurs industriels qui seraient regroupés sur un même site. Ces écosystèmes d’innovation seraient utilement complétés par un accroissement des moyens permettant de protéger et de valoriser les résultats de la recherche publique, ainsi que par des incitations financières à favoriser la recherche partenariale dans un cadre européen. Création d’une agence pour le numérique La commission propose aussi de consacrer 4 milliards d’euros à l’économie numérique : Internet très haut débit, fibre optique, nouveaux concepts d’ordinateurs, et aide aux « réseaux intelligents ». Une agence de moyens légère (l’Agence pour le numérique), pourrait rapidement être créée à cet effet. Financée notamment par l’emprunt national, l’agence pour le numérique aurait pour objet de co-investir dans l’économie numérique, en agissant à la fois sur les infrastructures et sur le développement de nouveaux usages et contenus. D’une part, il convient d’accélérer la transition de la France vers le très haut débit en développant les infrastructures les plus pertinentes économiquement et techniquement (fibre optique, solutions satellitaires, très haut débit mobile…) pour les zones les moins denses afin de favoriser l’accès, à terme, au très haut débit sur l’ensemble du territoire. D’autre part, la commission propose de financer des projets partenariaux publics-privés de recherche et de démonstration visant la conception de logiciels, d’usages et de contenus numériques innovants dans tous les domaines, en premier lieu dans les réseaux intelligents (électriques et de transport), mais aussi dans le télétravail, la télémédecine, l’e-santé, l’e-administration, l’e-éducation, l’e-justice, la numérisation des contenus culturels… au besoin en s’appuyant sur le développement d’infrastructures partagées (cloud computing, supercalculateurs…). Un fonds dédié à cet objectif, distinct du fonds précédent sur les infrastructures, pourrait être créé au sein de la nouvelle agence pour le numérique. La commission préconise en outre de réserver 2 milliards d’euros d’investissements dans les nanotechnologies et les biotechnologies, 3,5 milliards dans les énergies renouvelables et 4,5 milliards dans la « ville de demain » (en particulier l’efficacité énergétique des logements sociaux). Le rapport propose notamment que soient cofinancés dix programmes urbains intégrés, qui portent à la fois sur le transport collectif décarboné, le développement expérimental d’infrastructures de recharge électrique des véhicules propres et l’expérimentation de solutions nouvelles de rénovation urbaine durable (pour densifier l’espace et assurer la mixité sociale dans un habitat à haute performance énergétique), de réseaux intelligents (d’eau et électricité), de gestion durable des déchets et de maîtrise de la mobilité (plates-formes de télétravail, régulation du trafic automobile…). Enfin, le rapport suggère de consacrer 3 milliards d’euros aux « mobilités du futur » (recherche sur les matériaux permettant de construire des avions plus légers et plus sobres en carburant, voiture électrique) et 2 milliards d’euros au soutien des PME innovantes, dans les secteurs prioritaires définis par la stratégie nationale de recherche et d’innovation tels que les technologies de l’information et de la communication, des nanotechnologies, l’environnement et les écotechnologies. (*) Le rapport de 128 pages est consultable sur le site de la Documentation Française. La commission propose de consacrer 4 milliards d’euros à l’économie numérique : Internet très haut débit, fibre optique, nouveaux concepts d’ordinateurs, et aide aux “ réseaux intelligents ”.

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